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14 février 2009 6 14 /02 /février /2009 05:51
AIDE

LE PREMIER ORDRE en France : l’ORDRE RELIGIEUX (moines et prêtres)


•une critique “morale” et politique•


[-en arrière-plan il vous faut avoir à l’esprit la question morale : quand on demande à DD s’il y a une morale matérialiste il commence par répondre : 1-la morale religieuse est peu morale (inhumaine) et 2-les religieux sont rarement moraux.

 

.]



-il convient de partir de l’athéisme de DD qui ne se contente pas de dire comme le M :”Je n’aime pas les prêtres” : selon lui la croyance est une erreur au regard de la raison et c’est quelque chose de nuisible à l’homme et à la société. On rappellera toujours que selon DD trois codes dominent les hommes : le 3ème, le religieux est d’une telle nocivité qu’il pervertit les deux autres.



Pourquoi ?


1/-parce que le religieux instaure un code contre-nature : toujours rappeler que DD est l’auteur de LA RELIGIEUSE.


Le plus frappant étant la question de l’abstinence en particulier chez les moines : personne ne respecte ce voeu et DD a toute la littérature avec lui, en particulier Rabelais pour le prouver ; quand on voit la réaction du peuple lors de l’arrestation de Richard ou le “tableau” dessiné par J avec le moine et les deux filles 261, on constate que personne ne se fait d’illusion dans la “populace” (le mot est de J). Il suffit encore de parler des prémontrés avant la venue et la reprise en main de Hudson p247.


L’autre contrainte pour les moines, celle de l’enfermement : le marquis exprime une théorie sur le corps des jeunes gens prisonniers du couvent ou du monastère qui doit tout à DD 245.([Vous mesurez que la “psychologie” de DD est bien matérialiste :la voix de dieu est en fait une manifestation du tempérament...]


2/-conséquence : le code religieux est un “bâillon” sur le corps désirant de l’homme qui donne des malheureux (regrets, désespoir, folie 245), des pervers, des méchants (comme les moines selon le M quand il écoute les aventures du frère de J.) ou surtout des hypocrites.


Leur tartufferie est fondamentale, elle est presque une seconde nature et elle se manifeste à différents niveaux :


-ils trahissent leurs voeux, ce qui n’est pas rien. Pensons au vicaire amoureux de Suzon, “paillard, jaloux” 297 ; aux prélats libertins et blasés 170, à Frère Jean qui fait des enfants dans tout le village, à Hudson, à sa gourmandise, à ses maîtresses, à sa “marcheuse”, à ses mensonges, ses mises en scène. Hudson ou presque tous les péchés capitaux en un seul homme, d’église : un comble.


-ils se couvrent du manteau (masque) de la religion pour faire carrière : le petit abbé amant de petite d’Aisnon est rudement traité dans le récit Pom (170 impie & incrédule (voilà pour la foi), dissolu (voilà pour le sexe) : il veut arriver à l’épiscopat. Il n’a aucun talent. Hudson en fin de carrière aura une très riche abbaye...


-chez les plus habiles, ce que Dd redoute c’est le pouvoir de la Parole (cf cours) : il a connu l’éducation des jésuites, il sait combien un prêtre bien formé peut être habile, sournois, cauteleux et user d’une parole séduisante, enjôleuse, spirituelle comme celle de Hudson ; éclatante aussi la leçon de comédie de Pom aux d’Aisnon (verbiage de la mysticité 176).



- si dans leurs sermons ils prônent le respect à la lettre de l’Évangile, ils n’ont en pratique aucun respect pour cette doctrine dont ils sont en principe les messagers : ils ont un appétit de pouvoir qui les poussent à des guerres fratricides pour imposer leur position théologique (janséniste, molinisme, jésuitisme) qu’ils instrumentalisent car elle n’est qu’un tremplin pour leur ascension et un moyen de contrôle sur les autres. Même le gaillard Jean a des vues sur l’Ordre des carmes. Au plan intellectuel ils énoncent des sornettes comme ce Taste que ridiculise J 365. En pratique on ne rencontre que Le Pelletier qui est vraiment charitable et évangélique dans sa pratique, sans être autre chose qu’un simple citoyen : mais tout le monde le prend pour un fou. Sauf les pauvres....



Pire : entre “sectes”(249), au sein d’une concurrence acharnée pour la prééminence, ils sont capables de tous les coups : le “général” janséniste 249 envoie deux espions contre le jésuite Hudson...Travail d’espion, de police des mœurs...Au coeur du monastère des premontrés, Hudson attire toutes les haines, tous les complots. On sait que la morale chrétienne prêche le pardon et la miséricorde...



-leur pouvoir est dangereux : les carmes sont capables de rendre fou frère Ange ; plus grave ils sont proches du Pouvoir et Hudson dupe le ministre qui a de toute façon besoin de lui pour un contrôle social des “âmes”. Plus radicalement (on approche de la lecture politique qu’a DD de la religion) la religion habitue les pauvres a tolérer leur misère 183 : Mme de la Pom entend que la religion est une bonne chose, elle est un opium comme dira Marx après. Elle permet de patienter en attendant la récompense pour l’au-delà (183). On sait que J, dans sa sagesse, son pragmatisme matérialiste ne se préoccupe pas de la mort et préfère jouir du présent 262.



Le grand souci de DD dont je parle souvent est le machiavélisme dont fait preuve un Hudson, double de Pom, en plus dangereux parce que touchant au pouvoir social et à la mise au pas de tous. Hudson est une figure religieuse pensée aussi par DD comme figure politique : il est le tyran par excellence. Dans son monastère. Il entretient des haines, il asservit durement ses prémontrés. Mais en allant trouver appui auprès du ministre 255 qui n’est pas loin de côtoyer le très puissant Mirepoix 250 (Boyer), en devenant un agent de la police qu’il utilise, il montre combien le pouvoir religieux est au service d’un pouvoir plus large et tenté par le despotisme. La religion est aux yeux de DD un discours qui abêtit le peuple et une arme pour les ambitieux. Seuls le plaisir et la carrière comptent pour ces religieux, talentueux ou médiocres. Ce qui en soi n’est pas forcément scandaleux pour un homme ou une femme mais qui montre la malfaisance du code religieux qui soumet tout le monde et pervertit la nature en chacun.



À l’opposé, un J fataliste, qui pourrait être un possédé de Belzebuth selon le M 366 est certes un peu manipulateur, certes un peu têtu mais ô combien charitable et tellement plus “naturel”.

Sans penser seulement à lui, réfléchissons à la maîtresse de Desg(347/8) choisie sciemment par le romancier [qui la rapproche de Ninon de Lenclos, la grande courtisane (qui aida Voltaire), femme de goût] :

- elle aimait avoir des amants, toujours de qualité.

- libertine de moeurs, sans moeurs dit le M, elle était condamnable. On la condamnait.

- elle se condamnait : elle avait toujours des remords - qui la rendaient malheureuse : le remords n’a rien à voir avec la Nature selon DD. Elle prenait malgré tout un autre amant. Encore et encore. Alternant voluptés et remords. Sans aller voir souvent son curé pour prier mais seulement pour faire l’aumône. Pas de comédie de prière : des actes charitables.

-CAR elle avait de la probité : elle était recherchée pour son honnêteté.

-elle a une formule un peu cynique : la religion et les lois sont des béquilles pour les faibles. Propos d’aristocrate supérieure & méprisante comme Pom ? Morale d’êtres forts, supérieurs et supérieurs aux lois juste faites pour les faibles ?

Tout le problème est dans le sens qu’on donne à faible. Socialement ou “naturellement” ? Les faibles socialement ne le sont pas forcément naturellement (au sens de la philosophie organiciste et matérialiste de DD : un J n’a pas besoin de béquilles et le peuple a sans doute besoin d’autre chose que de la charité). Cette femme est faite pour le plaisir physique ce qui ne signifie pas qu’elle est immorale : elle est “un exemple” précieux d’honnêteté selon DD mais elle reste dans le schéma de pensée dont il veut nous débarrasser : celui de l’utilité de la religion - pour certains. Toute l’oeuvre de Dd, en tout cas après 1750, témoigne de l’inutilité et de la nuisance de la religion. Elle avait des remords, ses ennemis disait-elle. Remords qui ne changeaient rien mais gâchaient son plaisir sans la porter à plus de morale qu’elle avait de toute façon.

cl : en homme des Lumières Dd cherchait à montrer, à démontrer, à convaincre, à séduire pour émanciper. Pour modifier. Ce qui prouve que le fatalisme (le mot déterminisme est préférable ici) n’est pas dans le laisser-aller mais dans l’analyse des causes. On comprend bien l’allusion à Fragonard avec la scène tableau dessinée par J à partir de récit de Richard : à l’emprise de la propagande religieuse, les Lumières opposent le savoir et l’art. Et fidèle à la philosophie de J, d’un mal qui donne un bien et du contrepoison qui guérit du poison, DD bénit sans doute le manque de talent des théologiens de son époque 174 : ils n’ont pas le talent d’un Bossuet, heureusement ; ainsi ils sont donc plus faciles à vaincre...

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9 février 2009 1 09 /02 /février /2009 06:23

Partir de Voltaire et de son  Candide ou  l’optimisme auquel DD fait allusion avec la destruction Lisbonne où meurt le frère de J, Jean.

 Voltaire s'en prenait à une représentation idyllique de la réalité du monde.Quelle est la vision de DD le matérialiste?



1/ PESSIMISTE :DD



a)donne souvent une image désespérante de l’humanité :


-quelle misère économique et sociale : à vous.Paysans, peuples.


-que de vols d’escroqueries, y compris au sein de la noblesse à vous), que d’usurpations de pouvoirs (château !)



-que d’hommes douteux : dans l’église (les moines, Hudson etc), au pouvoir (conseillers), dans la justice (lettres de cachet), que d’intolérance!



b) un scepticisme monte vite du livre quand il s’agit de juger, d’interpréter :



-erreurs de justice (lieutenant général) ; J en prison à la place de son maître ...


-signes équivoques, thèse du quiproquo..


-changement permanent des êtres : thèse de J : on ne s’entend pas , incommunication entre les hommes et soi-même on change dans la journée;

-même dans le roman on ne peut savoir si le capitaine est mort ..



c) prise au premier degré la philo de J est déprimante : l’homme se croit libre ; il se croit capable de vouloir : il ne sait rien, ne peut savoir ce qui est écrit .




Que faire ? Comme vivre? laisser faire, ne s’étonner de rien, subir ? Quelle morale ?


2/OPTIMISTE :



a) le matérialisme n’implique pas la vie d’automate absolu et l’absence de morale : J pleure (où? -à vous) et quand les gens généreux existent, la pitié est visible et l’intérêt  ne domine pas partt et tt le temps ; son matérialisme comprend intérêt et pitié, souci de l’autre.




b) dans la société il y a à faire et c'est heureux:il ne faut pas subir, attendre.


- à l’instar de J, déterministe et non fataliste au sens strict ;ll agit,il intervient, il réagit, prend des initiatives;


-  on peu tenter d’agir , penser, repétrer les causes, les limiter comme le veut le projet  de l’Encyclopédie : les bons juges devront être bien formés, ils feront moins d'erreurs et ils devront rendre la justice et non favoriser leur carrière etc...
 

  -J prend le pouvoir ou presque : il symbolise le mérite qu'il faut récompenser



c)au plan de la liberté :


 J nous apprend qu'avec de l'observation, de l'esprit NOUS pouvons arranger le monde pour qu'il soit le plus proche de  nos attentes.



3/NI L’UN NI L’AUTRE : il représente une forme de sagesse qui pense moins le mal et le bien que le bon et le mauvais :



a)sagesse, non d’un manichéisme, non d’une lutte du bien contre le mal mais d’une complémentarité du bien et du mal : réciprocité qui permet tjrs d’espérer un changement puisque tout change.Exemple de la cruche : elle apporte des soucis à J mais aussi une chance de rencontrer Denise.



b) un art de vivre joyeusement : la vie heureuse à l'auberge, la gourde , le corps connaissant une  sexualité tranquille sans honte et sans remords.


c)une conviction qui vaut pour l’art : la nature produit des êtres incroyable de diversité, d’hétérogénéite : des cocasses, des malfaisants mais sublimes (Pom, Hudson etc.)


=>DD nous fait voir, tolérer, aimer toutes les richesses de la vie.Le roman peut-il être alors pessimiste?

 

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16 janvier 2009 5 16 /01 /janvier /2009 05:28
TEXTE 1:


        - QUELLE EST L'ORIGINALITÉ  DE L'INCIPIT ?

        -EN QUOI CET INCIPIT RELÈVE-T-IL DE LA CRITIQUE DANS LE ROMAN ?


TEXTE 2:GOUSSE.

        -QUELLE EST LA DIMENSION "PHILOSOPHIQUE" DE CE TEXTE?


TEXTE 3: LA GOURDE


          -EN QUOI CE TEXTE EST-IL UN TEXTE DES LUMIÈRES ?



TEXTE 4: FIN DU MANUSCRIT


           -QUELLE EST LA PART DE L'HUMOUR, DE L'IRONIE, DE LA PARODIE DANS CE TEXTE ?

         
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27 décembre 2008 6 27 /12 /décembre /2008 17:45



VERSION BRÈVE : votre fiche de base.

  Rappeler l'apparition récente du mot (1724) et bien dire que DD ne pouvait connaître le mot déterminisme apparu après lui ; apprécions la définition de l’abbé Pluquet en1757 : “Le fatalisme est un système qui suppose que tout existe nécessairement, et qui attribue tous les phénomènes de la nature à une force sans liberté”.Voyons ce qu'en pense J dont le prénom est associé  dès le titre à ce concept philosophique

 


1/LES CONVICTIONS DÉCLARÉES de J :


A/SES REFUS :

-le finalisme dans la nature et le providentialisme :rien dans la nature n'a été fait par une Volonté (divine) et encore moins par une Volonté qui aurait voulu le meilleur pour l'homme.


B/SES PRINCIPES :


-tout est lié dans la nature, tout ce qui est est nécessaire (243 etc). Au sens de : devait avoir lieu. On pense évidemment à l’incroyable série causale qui va du cabaret au genou de Denise et constitue le récit des amours..

L’absence de lien sera appelé hasard qui ne sera que le résultat d’une ignorance.


  Tout dans la nature et en l’homme est à la fois cause et effet, causes et effets aux intensités multiples 360. L’image forcément simpliste et réductrice de la gourmette sert à comprendre ces liens.



-être c’est être un effet, en réalité une infinité d’effets et de causes.


-J va plus loin : comme une déjà longue tradition, il associe l’homme à une machine, une sorte d’automate avec un ressort de plus mais qui réagit dans la rencontre des parties de son corps et des parties extérieures (tel fait, tel acte etc).


-la conséquence logique suit : J fidèle à Spinoza récuse les concepts de libre-arbitre, de liberté humaine, de volonté (humaine ou divine même comme on sait) : dév la pierre de Sp ou la boule de J 243. 



- autre conséquence capitale qui fait hurler les théologiens : il récuse la distinction d’un monde physique et d’un monde moral : inutile d’introduire une âme qui serait à part et relancerait l’idée d’une origine divine.



C/LA CONSÉQUENCE MORALE, enjeu fondamental du débat:


-l’effet de cette pensée sur la morale est évident.  


          - s’il n’ y a que causalités à l’œuvre, s’il n’ y a pas de liberté, il n’y a ni vertu, ni vice. J hausse les épaules 243.


         - il y a des êtres heureusement nés pour la bienveillance ou malheureusement nés pour la malveillance.


      


  -sur ces bases qui choquent les spiritualistes, J prouve fréquemment (comme la maîtresse de Desg (personnage capital ! 347/8)) que la liberté de moeurs  comme la théorie fataliste n’empêchent pas d’être à peu près honnête, loyal, ... : question de constitution, de corps : la pitié est aux endroits décisifs du roman et on sait qu’elle dépend des entrailles selon DD. Le malfaisant devra tâter du bâton - ou pire selon la lettre à Landois. Mais il faut compter avec la culture, l’éducation.


[Dans la lettre à Landois, il est patent que DD croit jusqu’à un certain point à l’efficacité de l’éducation (par l’exemple, le discours, le grand modèle, par la souffrance d’autrui etc.)]


Il y a chez le matérialiste une morale sociale.



II/UNE PRATIQUE BIEN PEU FATALISTE - plutôt déterministe même si le mot n’existait pas.. .



A/ J EST INCONSÉQUENT (il le dit clairement et se traite souvent de sot)


-certes au quotidien, quand les problèmes ne surgissent pas, il a un certain détachement et aime prendre son temps : cf J à cheval 21 & 46 : J ne se presse pas souvent et ne s’étonne pas non plus beaucoup.


-sa sensibilité est peu fataliste au sens strict : pourquoi pleurer un frère, un capitaine (et de façon presque pathétique 69) ? Retenons d’emblée que pour quelqu’un qui, devenu concierge enseigne Zénon de Cittium, on n’a pas affaire à un vrai stoïcien : il a essayé de l’être mais sans résultats cf 117(page capitale). Encore que dans sa prison, il le soit plus.


-il se met en colère, il réplique vivement, il fonce chez les brigands, il se maudit dans la négociation avec le chirurgien 110, il se plaint des cousins-moustiques, il regrette son beau geste (cruche). Spontanément. C’est une part automatique de son être :110 il tempête, il jure. Après réflexion il revient à son refrain comprend son erreur et se console.



*J dirait que sa nature, son être ont été constitué ainsi : se fâcher, se contredire font partie des causes contre lesquelles il ne peut rien spontanément.


Disons que DD fait un portrait lucide d’un être partagé entre conception théorique et pratique.


Mais J est plus que cela :il se sert de son fatalisme bien habilement.


B/Un FATALISME QUI CACHE SOUVENT UN DÉTERMINISME : une arme et un alibi



Sans connaître Spinoza, J a, sans le savoir, croisé, un tout tout petit peu, la connaissance du deuxième genre de Sp : la connaissance des rapports, la connaissance par la raison et donc des causes et des effets.



On peut avec l’aide de la raison comprendre non toutes les causes mais essayer d’en déterminer quelques - unes : après examen intelligent. Certes tous les signes sont potentiellement ambigus (et on connaît sa théorie du quiproquo et on a du mal à savoir dans le texte même quand et où le capitaine de J est mort), mais on peut modestement deviner que Richard a été moine, qu’un cheval récalcitrant est un cheval qui refuse les travaux de la campagne ; on peut chercher à comprendre pourquoi tel cheval s’emballe sans avoir recours comme le maître à la superstition....


On peut étudier les êtres, les deviner quand on a repéré des constantes : par exemple le M est un automate, il réagit plus qu’il n’agit, il est passif, on le tient par des contes, il est bon malgré ses colères, on peut le moquer. En le fréquentant J a appris à le maîtriser, à tout faire à sa place, bref à le dominer pour le profit des deux.




- nous sommes déjà à une degré supérieur et on saisit que le déterminisme (mot, répétons-le toujours, qui n’existait pas au temps de DD) ne se confond pas avec le fatalisme : dans le premier, je pense les causes (au plan scientifique et même social : j’examine la religion et ses effets pervers, la mauvaise justice et plus généralement l’État et ses dysfonctionnements et je peux intervenir en amont, par boucle de rétroaction). La raison ne vient pas d’en haut, elle progresse, elle s’affine par l’apprentissage, avec la répétition des expériences. Le hasard, ce que l’on nomme hasard ou ce que J quand il récite son refrain appelle écriture d’en-haut est un déterminisme non décelé encore. Le déterminisme est la meilleure remontée de la pente fataliste.



C/TOUT SAUF UNE RÉSIGNATION (comme l'indique le sens classique de fatalisme)


J a conscience de ses nombreuses limites (par exemple il ne devine pas que l’homme civil qui le sauva est un bourreau, lui qui sait pourtant deviner la cause de l’attitude automatique d’un cheval) et DD lui-même devait reconnaître chaque jour les limites du savoir humain, ce qui le rendait curieux de tout. On ne peut que progresser dans l’accumulation des acquis et des remises en cause des dogmes. Il est des causes partout : il est permis de travailler sur certaines de ces causes.

Le roman (le romancier) par le biais d’un J aux intérêts limités (encore que d’après le passage sur la gourde il se prononce sur absolument tout...) suggère qu’il faut œuvrer à la libération de l’homme (au plan social, religieux, politique) en sachant qu’on ne peut tout et qu’il y a aura des résistances. Avec la raison mais en sachant que la raison est parfois fantaisie. En sachant qu’on n’est pas libre absolument mais que la connaissances des conditions et des rapports peut améliorer les effets de certaines causes..L’homme peut agir et penser et faire des causes des leviers de son action.



Dans son domaine modeste, J a tout de même bien œuvré : il prend le pouvoir par “contrat”, “humilie” le maître, refuse les coups qu’il acceptait de façon fataliste à la première étape ....mais la bride de son cheval casse et il se retrouve en prison. La vie est certes une machine mais vivante et elle n’est heureusement pas une machine intégralement prédictible. Faute de connaissance et non effet du hasard.


cl : le fatalisme de J est étonnant : voilà un être voué socialement à la dépendance et qui théorise une dépendance absolue de l’homme vis à vis des causes : en même temps on a rarement vu agent aussi libre et aussi maître de son maître...Avant tout, au quotidien, son fatalisme est un cadre de pensée du monde, une consolation devant le pire, un levier (il permet d’agir, de composer des rapports avec autrui qui tournent - plus ou moins - à l’avantage des deux, il permet une libération des dépendances par la connaissance des causes et l’appréciation des effets) et souvent un alibi : pour ne pas agir et pour n’en faire qu’à sa tête....Puisqu’il est écrit qu’il n’en ferait qu’à sa tête....

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27 décembre 2008 6 27 /12 /décembre /2008 16:17

  Rappeler l'apparition récente du mot (1724) et bien dire que DD ne pouvait connaître le mot déterminisme apparu après lui ; apprécions la définition de l’abbé Pluquet en1757 : “Le fatalisme est un système qui suppose que tout existe nécessairement, et qui attribue tous les phénomènes de la nature à une force sans liberté”.

 

-le fatalisme est une doctrine considérée comme scandaleuse par les spiritualistes* et acceptée par d’autres franchement athées : le fatalisme (qui n’est pas un, qui est divers) provoque à la fois débat sur la connaissance mais surtout sur la morale [et on comprend vite que derrière ce concept se cache la question : qui est Cause de toutes les causes ? Dieu, la matière ? Le roman ne répondra que très indirectement à la question.]



1/LES CONVICTIONS DÉCLARÉES de J :


A/SES REFUS :

-le finalisme dans la nature et le providentialisme :rien dans la nature n'a été fait par une Volonté (divine) et encore moins par une Volonté qui aurait voulu le meilleur pour l'homme.

-un de passages les plus spinozistes que J ne confirme pas souvent tient dans sa mise en cause d’une volonté divine 134.


B/SES PRINCIPES :


-tout est lié dans la nature, tout ce qui est est nécessaire (243 etc). Au sens de : devait avoir lieu. On pense évidemment à l’incroyable série causale qui va du cabaret au genou de Denise et constitue le récit des amours..

L’absence de lien sera appelé hasard qui ne sera que le résultat d’une ignorance.


Il y a une chaîne infinie d’éléments qui se développent selon une logique extérieure (la rencontre, le choc, l’assimilation etc) et intérieure (chaque sujet réagit à sa manière singulière suivant les lois uniques de son corps) : tout dans la nature et en l’homme est à la fois cause et effet, causes et effets aux intensités multiples 360. L’image forcément simpliste et réductrice de la gourmette sert à comprendre ces liens.



-être c’est être un effet, en réalité une infinité d’effets et de causes.


-J va plus loin : comme une déjà longue tradition, il associe l’homme à une machine, une sorte d’automate avec un ressort de plus mais qui réagit dans la rencontre des parties de son corps et des parties extérieures (tel fait, tel acte etc).


-la conséquence logique suit : J fidèle à Spinoza récuse les concepts de libre-arbitre, de liberté humaine, de volonté (humaine ou divine même comme on sait) : dév la pierre de Sp ou la boule de J 243. [C’est seulement ce qu’on retient à tort de l’appendice du livre I de L’ÉTHIQUE. Sp étant bien un grand penseur de la liberté ...Allez voir le titre du Livre V de l’ÉTHIQUE, sommet de la pensée spinozienne. De la Pensée.]


-J va jusqu’à récuser la notion d’acte gratuit* dans l’aventure du cheval (à la fin) précédée d’un dialogue (sur les cousins)) qui montre que l’acte gratuit dostoïevskien ou gidien (LES CAVES DU VATICAN) est impossible : une liberté qui cherche à se prouver absolument est une obéissance à une cause, à une interpellation.


- autre conséquence capitale qui fait hurler les théologiens : il récuse la distinction d’un monde physique et d’un monde moral : inutile d’introduire une âme qui serait à part et relancerait l’idée d’une origine divine.



C/LA CONSÉQUENCE MORALE, enjeu fondamental du débat:


-l’effet de cette pensée sur la morale est évident.  RETENIR L’ESSENTIEL.


- s’il n’ y a que causalités à l’œuvre, s’il n’ y a pas de liberté, il n’y a ni vertu, ni vice. J hausse les épaules 243.


-il y a des êtres heureusement nés pour la bienveillance ou malheureusement nés pour la malveillance.


-le jugement est toujours complexe (qui peut juger Gousse ?) et le relativisme des valeurs est nettement souligné dans le roman même si deux postulats sont sans cesse rappelés : il faut penser à soi (se défendre est naturel, survivre est naturel, ainsi même les moustiques...) et, dans le même temps notre identité commune (êtres de nature) nous rend naturellement solidaires de l’humanité. Ne pas aller dans ce sens est rédhibitoire aux yeux de DD. Il y a en nous un universel, le code de la nature que la morale notamment religieuse contrarie au point d’être contre - nature.  Il faut de toute urgence détacher l’homme de la servitude religieuse et lui apprendre à percer à jour avec la raison les tartufferies d’un Hudson.


-sur ces bases qui choquent les spiritualistes, J prouve fréquemment (comme la maîtresse de Desg (personnage capital !)) que la liberté de moeurs  comme la théorie fataliste n’empêchent pas d’être à peu près honnête, loyal, ... : question de constitution, de corps : la pitié est aux endroits décisifs du roman et on sait qu’elle dépend des entrailles selon DD. Le malfaisant devra tâter du bâton - ou pire selon la lettre à Landois. Mais il faut compter avec la culture, l’éducation.


[Dans la lettre à Landois, il est patent que DD croit jusqu’à un certain point à l’efficacité de l’éducation (par l’exemple, le discours, le grand modèle, par la souffrance d’autrui etc.)]


Il y a chez le matérialiste une morale sociale.



II/UNE PRATIQUE BIEN PEU FATALISTE - plutôt déterministe même si le mot n’existait pas. .



A/ IL EST INCONSÉQUENT (il le dit clairement et se traite souvent de sot) et vit à sa façon le clivage pratique / théorie que Dd avouait pour lui-même dans sa RÉFUTATION D’HELVÉTIUS (voir la fiche de citations que je vous ai donnée un beau jour)


-certes au quotidien, quand les problèmes ne surgissent pas, il a un certain détachement et aime prendre son temps : cf J à cheval 21 & 46 : J ne se presse pas souvent et ne s’étonne pas non plus beaucoup.


-sa sensibilité est peu fataliste au sens strict : pourquoi pleurer un frère, un capitaine (et de façon presque pathétique 69) ? Retenons d’emblée que pour quelqu’un qui, devenu concierge enseigne Zénon de Cittium, on n’a pas affaire à un vrai stoïcien : il a essayé de l’être mais sans résultats cf 117(page capitale). Encore que dans sa prison, il le soit plus.


-il se met en colère, il réplique vivement, il fonce chez les brigands, il se maudit dans la négociation avec le chirurgien 110, il se plaint des cousins-moustiques, il regrette son beau geste (cruche). Spontanément. C’est une part automatique de son être :110 il tempête, il jure. Après réflexion il revient à son refrain comprend son erreur et se console.


-par rapport à Dieu, notons aussi l’inconséquence de la prière de J : elle contredit l’idée de J selon laquelle Dieu ne saurait avoir de volonté : il parle de corps (doigt), de volonté de Dieu 225. Or le spinozisme dont il se réclame refuse toute volonté à Dieu : Dieu voulant quelque chose se LIMITERAIT. Absurde en termes spinozistes.


*J dirait que sa nature, son être ont été constitué ainsi : se fâcher, se contredire font partie des causes contre lesquelles il ne peut rien spontanément.


Disons que DD fait un portrait lucide d’un être partagé entre conception théorique et pratique.


Mais J est plus que cela :il se sert de son fatalisme bien habilement.


B/Un FATALISME QUI CACHE SOUVENT UN DÉTERMINISME : une arme et un alibi

[il faut bien saisir que J est un personnage de fiction façonné à des fins persuasives et démonstratives par DD : il lui prête des erreurs, des approximations qui révèlent une réflexion insuffisante : ainsi de l’image du grand rouleau, du là-haut. (auquel DD ne croit pas) J a parfois des propositions étranges : il prie à tout hasard ( !!!) et on a vu qu’il parle du doigt de dieu 225 , véritable bouffonnerie aux yeux de DD (et "accessoirement" de Spinoza).


Sans connaître Spinoza, J a, sans le savoir, croisé, un tout tout petit peu, la connaissance du deuxième genre de Sp : la connaissance des rapports, la connaissance par la raison et donc des causes et des effets.



On peut avec l’aide de la raison comprendre non toutes les causes mais essayer d’en déterminer quelques - unes : après examen intelligent. Certes tous les signes sont potentiellement ambigus (et on connaît sa théorie du quiproquo et on a du mal à savoir dans le texte même quand et où le capitaine de J est mort), mais on peut modestement deviner que Richard a été moine, qu’un cheval récalcitrant est un cheval qui refuse les travaux de la campagne ; on peut chercher à comprendre pourquoi tel cheval s’emballe sans avoir recours comme le maître à la superstition....[Le romancier Dd lui sait bien où il veut en venir : le cheval est un automate, habitué aux fourches patibulaires..]


On peut étudier les êtres, les deviner quand on a repéré des constantes : par exemple le M est un automate, il réagit plus qu’il n’agit, il est passif, on le tient par des contes, il est bon malgré ses colères, on peut le moquer. En le fréquentant J a appris à le maîtriser, à tout faire à sa place, bref à le dominer pour le profit des deux.


On peut même anticiper  comme le laisse entendre (plaisamment et de façon rusée ) le dithyrambe de la gourde  non comme une astrologue mais pour tenter de deviner sur fond d’expérience ce qui va se produire comme dans un travail scientifique : la gourde est une astuce de J (boire sans remords) et un symbole fondamental pour DD : l’intuition du génie (scientifique, littéraire, politique) est dans le lien inédit qu’il fait entre des éléments jamais rapprochés et qu’il va unir pour créer, inventer, découvrir, transformer. Le scientifique anticipe, il a une idée produite par son travail, il se lance dans une hypothèse folle, on le croit saisi d’ivresse : la gourde alors est, à une autre échelle que celle de J, le symbole de son génie qui déborde de la normalité trop commune.


- nous sommes déjà à une degré supérieur et on saisit que le déterminisme (mot, répétons-le toujours, qui n’existait pas au temps de DD) ne se confond pas avec le fatalisme : dans le premier, je pense les causes (au plan scientifique et même social : j’examine la religion et ses effets pervers, la mauvaise justice et plus généralement l’État et ses dysfonctionnements et je peux intervenir en amont, par boucle de rétroaction). La raison ne vient pas d’en haut, elle progresse, elle s’affine par l’empirisme, avec la répétition des expériences. Le hasard, ce que l’on nomme hasard ou ce que J quand il récite son refrain appelle écriture d’en-haut est un déterminisme non décelé encore. Le déterminisme est la meilleure remontée de la pente fataliste.



C/TOUT SAUF UNE RÉSIGNATION


J a conscience de ses nombreuses limites (par exemple il ne devine pas que l’homme civil qui le sauva est un bourreau, lui qui sait pourtant deviner la cause de l’attitude automatique d’un cheval) et DD lui-même devait reconnaître chaque jour les limites du savoir humain, ce qui le rendait curieux de tout. On ne peut que progresser dans l’accumulation des acquis et des remises en cause des dogmes. Il est des causes partout : il est permis de travailler sur certaines de ces causes.

Le roman (le romancier) par le biais d’un J aux intérêts limités (encore que d’après le passage sur la gourde il se prononce sur absolument tout...) suggère qu’il faut œuvrer à la libération de l’homme (au plan social, religieux, politique) en sachant qu’on ne peut tout et qu’il y a aura des résistances. Avec la raison mais en sachant que la raison est parfois fantaisie. En sachant qu’on n’est pas libre absolument mais que la connaissances des conditions et des rapports peut améliorer les effets de certaines causes..L’homme peut agir et penser et faire des causes des leviers de son action.


Ainsi, pour revenir à J et à sa morale, on le croit indifférent aux récompenses et aux punitions mais il croit comme DD en la MODIFICATION  On peut transformer une situation en l’éclairant et c’est la même chose pour les êtres et en principe pour les êtres en société : DD n’est pas convaincu que l’éducation fasse tout (comme Helvétius) mais il ne va pas jusqu’à la thèse de Gousse qui réfute l’idée du moindre profit de l’École : pourquoi aurait-il entrepris cette “folie” qu’était L’ENCYCLOPÉDIE si ce n’est pour éclairer, orienter, donner les clés de la connaissance transformatrice ? DD croit en l’exemple, en la formation. J a la fin, concierge de château, devient à son tour initiateur : il enseigne encore et toujours Zénon  et Spinoza.


Dans son domaine modeste, J a tout de même bien œuvré : il prend le pouvoir par “contrat”, “humilie” le maître, refuse les coups qu’il acceptait de façon fataliste à la première étape ....mais la bride de son cheval casse et il se retrouve en prison. La vie est certes une machine mais vivante et elle n’est heureusement pas une machine intégralement prédictible. Faute de connaissance et non effet du hasard.


cl : le fatalisme de J est étonnant : voilà un être voué socialement à la dépendance et qui théorise une dépendance absolue de l’homme vis à vis des causes : en même temps on a rarement vu agent aussi libre et aussi maître de son maître...Avant tout, au quotidien, son fatalisme est un cadre de pensée du monde, une consolation devant le pire, un levier (il permet d’agir, de composer des rapports avec autrui qui tournent - plus ou moins - à l’avantage des deux, il permet une libération des dépendances par la connaissance des causes et l’appréciation des effets) et souvent un alibi : pour ne pas agir et pour n’en faire qu’à sa tête....Puisqu’il est écrit qu’il n’en ferait qu’à sa tête....

  Rappeler l'apparition récente du mot (1724) et bien dire que DD ne pouvait connaître le mot déterminisme apparu après lui ; apprécions la définition de l’abbé Pluquet en1757 : “Le fatalisme est un système qui suppose que tout existe nécessairement, et qui attribue tous les phénomènes de la nature à une force sans liberté”.

 

-le fatalisme est une doctrine considérée comme scandaleuse par les spiritualistes* et acceptée par d’autres franchement athées : le fatalisme (qui n’est pas un, qui est divers) provoque à la fois débat sur la connaissance mais surtout sur la morale [et on comprend vite que derrière ce concept se cache la question : qui est Cause de toutes les causes ? Dieu, la matière ? Le roman ne répondra que très indirectement à la question.]



1/LES CONVICTIONS DÉCLARÉES de J :


A/SES REFUS :

-le finalisme dans la nature et le providentialisme :rien dans la nature n'a été fait par une Volonté (divine) et encore moins par une Volonté qui aurait voulu le meilleur pour l'homme.

-un de passages les plus spinozistes que J ne confirme pas souvent tient dans sa mise en cause d’une volonté divine 134.


B/SES PRINCIPES :


-tout est lié dans la nature, tout ce qui est est nécessaire (243 etc). Au sens de : devait avoir lieu. On pense évidemment à l’incroyable série causale qui va du cabaret au genou de Denise et constitue le récit des amours..

L’absence de lien sera appelé hasard qui ne sera que le résultat d’une ignorance.


Il y a une chaîne infinie d’éléments qui se développent selon une logique extérieure (la rencontre, le choc, l’assimilation etc) et intérieure (chaque sujet réagit à sa manière singulière suivant les lois uniques de son corps) : tout dans la nature et en l’homme est à la fois cause et effet, causes et effets aux intensités multiples 360. L’image forcément simpliste et réductrice de la gourmette sert à comprendre ces liens.



-être c’est être un effet, en réalité une infinité d’effets et de causes.


-J va plus loin : comme une déjà longue tradition, il associe l’homme à une machine, une sorte d’automate avec un ressort de plus mais qui réagit dans la rencontre des parties de son corps et des parties extérieures (tel fait, tel acte etc).


-la conséquence logique suit : J fidèle à Spinoza récuse les concepts de libre-arbitre, de liberté humaine, de volonté (humaine ou divine même comme on sait) : dév la pierre de Sp ou la boule de J 243. [C’est seulement ce qu’on retient à tort de l’appendice du livre I de L’ÉTHIQUE. Sp étant bien un grand penseur de la liberté ...Allez voir le titre du Livre V de l’ÉTHIQUE, sommet de la pensée spinozienne. De la Pensée.]


-J va jusqu’à récuser la notion d’acte gratuit* dans l’aventure du cheval (à la fin) précédée d’un dialogue (sur les cousins)) qui montre que l’acte gratuit dostoïevskien ou gidien (LES CAVES DU VATICAN) est impossible : une liberté qui cherche à se prouver absolument est une obéissance à une cause, à une interpellation.


- autre conséquence capitale qui fait hurler les théologiens : il récuse la distinction d’un monde physique et d’un monde moral : inutile d’introduire une âme qui serait à part et relancerait l’idée d’une origine divine.



C/LA CONSÉQUENCE MORALE, enjeu fondamental du débat:


-l’effet de cette pensée sur la morale est évident.  RETENIR L’ESSENTIEL.


- s’il n’ y a que causalités à l’œuvre, s’il n’ y a pas de liberté, il n’y a ni vertu, ni vice. J hausse les épaules 243.


-il y a des êtres heureusement nés pour la bienveillance ou malheureusement nés pour la malveillance.


-le jugement est toujours complexe (qui peut juger Gousse ?) et le relativisme des valeurs est nettement souligné dans le roman même si deux postulats sont sans cesse rappelés : il faut penser à soi (se défendre est naturel, survivre est naturel, ainsi même les moustiques...) et, dans le même temps notre identité commune (êtres de nature) nous rend naturellement solidaires de l’humanité. Ne pas aller dans ce sens est rédhibitoire aux yeux de DD. Il y a en nous un universel, le code de la nature que la morale notamment religieuse contrarie au point d’être contre - nature.  Il faut de toute urgence détacher l’homme de la servitude religieuse et lui apprendre à percer à jour avec la raison les tartufferies d’un Hudson.


-sur ces bases qui choquent les spiritualistes, J prouve fréquemment (comme la maîtresse de Desg (personnage capital !)) que la liberté de moeurs  comme la théorie fataliste n’empêchent pas d’être à peu près honnête, loyal, ... : question de constitution, de corps : la pitié est aux endroits décisifs du roman et on sait qu’elle dépend des entrailles selon DD. Le malfaisant devra tâter du bâton - ou pire selon la lettre à Landois. Mais il faut compter avec la culture, l’éducation.


[Dans la lettre à Landois, il est patent que DD croit jusqu’à un certain point à l’efficacité de l’éducation (par l’exemple, le discours, le grand modèle, par la souffrance d’autrui etc.)]


Il y a chez le matérialiste une morale sociale.



II/UNE PRATIQUE BIEN PEU FATALISTE - plutôt déterministe même si le mot n’existait pas. .



A/ IL EST INCONSÉQUENT (il le dit clairement et se traite souvent de sot) et vit à sa façon le clivage pratique / théorie que Dd avouait pour lui-même dans sa RÉFUTATION D’HELVÉTIUS (voir la fiche de citations que je vous ai donnée un beau jour)


-certes au quotidien, quand les problèmes ne surgissent pas, il a un certain détachement et aime prendre son temps : cf J à cheval 21 & 46 : J ne se presse pas souvent et ne s’étonne pas non plus beaucoup.


-sa sensibilité est peu fataliste au sens strict : pourquoi pleurer un frère, un capitaine (et de façon presque pathétique 69) ? Retenons d’emblée que pour quelqu’un qui, devenu concierge enseigne Zénon de Cittium, on n’a pas affaire à un vrai stoïcien : il a essayé de l’être mais sans résultats cf 117(page capitale). Encore que dans sa prison, il le soit plus.


-il se met en colère, il réplique vivement, il fonce chez les brigands, il se maudit dans la négociation avec le chirurgien 110, il se plaint des cousins-moustiques, il regrette son beau geste (cruche). Spontanément. C’est une part automatique de son être :110 il tempête, il jure. Après réflexion il revient à son refrain comprend son erreur et se console.


-par rapport à Dieu, notons aussi l’inconséquence de la prière de J : elle contredit l’idée de J selon laquelle Dieu ne saurait avoir de volonté : il parle de corps (doigt), de volonté de Dieu 225. Or le spinozisme dont il se réclame refuse toute volonté à Dieu : Dieu voulant quelque chose se LIMITERAIT. Absurde en termes spinozistes.


*J dirait que sa nature, son être ont été constitué ainsi : se fâcher, se contredire font partie des causes contre lesquelles il ne peut rien spontanément.


Disons que DD fait un portrait lucide d’un être partagé entre conception théorique et pratique.


Mais J est plus que cela :il se sert de son fatalisme bien habilement.


B/Un FATALISME QUI CACHE SOUVENT UN DÉTERMINISME : une arme et un alibi

[il faut bien saisir que J est un personnage de fiction façonné à des fins persuasives et démonstratives par DD : il lui prête des erreurs, des approximations qui révèlent une réflexion insuffisante : ainsi de l’image du grand rouleau, du là-haut. (auquel DD ne croit pas) J a parfois des propositions étranges : il prie à tout hasard ( !!!) et on a vu qu’il parle du doigt de dieu 225 , véritable bouffonnerie aux yeux de DD (et "accessoirement" de Spinoza).


Sans connaître Spinoza, J a, sans le savoir, croisé, un tout tout petit peu, la connaissance du deuxième genre de Sp : la connaissance des rapports, la connaissance par la raison et donc des causes et des effets.



On peut avec l’aide de la raison comprendre non toutes les causes mais essayer d’en déterminer quelques - unes : après examen intelligent. Certes tous les signes sont potentiellement ambigus (et on connaît sa théorie du quiproquo et on a du mal à savoir dans le texte même quand et où le capitaine de J est mort), mais on peut modestement deviner que Richard a été moine, qu’un cheval récalcitrant est un cheval qui refuse les travaux de la campagne ; on peut chercher à comprendre pourquoi tel cheval s’emballe sans avoir recours comme le maître à la superstition....[Le romancier Dd lui sait bien où il veut en venir : le cheval est un automate, habitué aux fourches patibulaires..]


On peut étudier les êtres, les deviner quand on a repéré des constantes : par exemple le M est un automate, il réagit plus qu’il n’agit, il est passif, on le tient par des contes, il est bon malgré ses colères, on peut le moquer. En le fréquentant J a appris à le maîtriser, à tout faire à sa place, bref à le dominer pour le profit des deux.


On peut même anticiper  comme le laisse entendre (plaisamment et de façon rusée ) le dithyrambe de la gourde  non comme une astrologue mais pour tenter de deviner sur fond d’expérience ce qui va se produire comme dans un travail scientifique : la gourde est une astuce de J (boire sans remords) et un symbole fondamental pour DD : l’intuition du génie (scientifique, littéraire, politique) est dans le lien inédit qu’il fait entre des éléments jamais rapprochés et qu’il va unir pour créer, inventer, découvrir, transformer. Le scientifique anticipe, il a une idée produite par son travail, il se lance dans une hypothèse folle, on le croit saisi d’ivresse : la gourde alors est, à une autre échelle que celle de J, le symbole de son génie qui déborde de la normalité trop commune.


- nous sommes déjà à une degré supérieur et on saisit que le déterminisme (mot, répétons-le toujours, qui n’existait pas au temps de DD) ne se confond pas avec le fatalisme : dans le premier, je pense les causes (au plan scientifique et même social : j’examine la religion et ses effets pervers, la mauvaise justice et plus généralement l’État et ses dysfonctionnements et je peux intervenir en amont, par boucle de rétroaction). La raison ne vient pas d’en haut, elle progresse, elle s’affine par l’empirisme, avec la répétition des expériences. Le hasard, ce que l’on nomme hasard ou ce que J quand il récite son refrain appelle écriture d’en-haut est un déterminisme non décelé encore. Le déterminisme est la meilleure remontée de la pente fataliste.



C/TOUT SAUF UNE RÉSIGNATION


J a conscience de ses nombreuses limites (par exemple il ne devine pas que l’homme civil qui le sauva est un bourreau, lui qui sait pourtant deviner la cause de l’attitude automatique d’un cheval) et DD lui-même devait reconnaître chaque jour les limites du savoir humain, ce qui le rendait curieux de tout. On ne peut que progresser dans l’accumulation des acquis et des remises en cause des dogmes. Il est des causes partout : il est permis de travailler sur certaines de ces causes.

Le roman (le romancier) par le biais d’un J aux intérêts limités (encore que d’après le passage sur la gourde il se prononce sur absolument tout...) suggère qu’il faut œuvrer à la libération de l’homme (au plan social, religieux, politique) en sachant qu’on ne peut tout et qu’il y a aura des résistances. Avec la raison mais en sachant que la raison est parfois fantaisie. En sachant qu’on n’est pas libre absolument mais que la connaissances des conditions et des rapports peut améliorer les effets de certaines causes..L’homme peut agir et penser et faire des causes des leviers de son action.


Ainsi, pour revenir à J et à sa morale, on le croit indifférent aux récompenses et aux punitions mais il croit comme DD en la MODIFICATION  On peut transformer une situation en l’éclairant et c’est la même chose pour les êtres et en principe pour les êtres en société : DD n’est pas convaincu que l’éducation fasse tout (comme Helvétius) mais il ne va pas jusqu’à la thèse de Gousse qui réfute l’idée du moindre profit de l’École : pourquoi aurait-il entrepris cette “folie” qu’était L’ENCYCLOPÉDIE si ce n’est pour éclairer, orienter, donner les clés de la connaissance transformatrice ? DD croit en l’exemple, en la formation. J a la fin, concierge de château, devient à son tour initiateur : il enseigne encore et toujours Zénon  et Spinoza.


Dans son domaine modeste, J a tout de même bien œuvré : il prend le pouvoir par “contrat”, “humilie” le maître, refuse les coups qu’il acceptait de façon fataliste à la première étape ....mais la bride de son cheval casse et il se retrouve en prison. La vie est certes une machine mais vivante et elle n’est heureusement pas une machine intégralement prédictible. Faute de connaissance et non effet du hasard.


cl : le fatalisme de J est étonnant : voilà un être voué socialement à la dépendance et qui théorise une dépendance absolue de l’homme vis à vis des causes : en même temps on a rarement vu agent aussi libre et aussi maître de son maître...Avant tout, au quotidien, son fatalisme est un cadre de pensée du monde, une consolation devant le pire, un levier (il permet d’agir, de composer des rapports avec autrui qui tournent - plus ou moins - à l’avantage des deux, il permet une libération des dépendances par la connaissance des causes et l’appréciation des effets) et souvent un alibi : pour ne pas agir et pour n’en faire qu’à sa tête....Puisqu’il est écrit qu’il n’en ferait qu’à sa tête....


 

 

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26 décembre 2008 5 26 /12 /décembre /2008 17:04


Bien vite situer et caractériser le mouvement des Lumières. AUTRE SÉQUENCE BIENTÔT[on ne sait quand a émergé exactement ce mot et à qui on doit son essor vers la fin du 17 et début du 18ème ; on le trouve chez Descartes, Bayle etc ; on le doit sans doute à l’influence de l’enlightment anglaise si importante et évidemment cette image très ancienne a servi avant dans des contextes religieux qui n’ont absolument rien à voir.] Retenons que DD fait partie des Lumières à sa façon car il n’y a pas un mouvement homogène des L (quoi de vraiment commun entre J-J et les autres, entre Diderot et Voltaire malgré des cibles semblables etc ?),et qu’il emploie le mot en épigraphe d’une de ses œuvres avec un vers de Lucrèce “des ténèbres nous pouvons voir ce qui est la lumière”.]



Partir de l’éloge de Socrate par le M, éloge où tout est dit sur le rôle des philosophes 101.



1/UN ROMAN QUI A UNE DIMENSION “DIDACTIQUE” :



• au sens où les Lumières veulent éclairer en diffusant savoirs, techniques et pensées. Parler du projet de l’ENCYCLOPÉDIE. Même si le mot ne correspond pas à notre idée actuelle de démocratie, il y a chez les Lumières une volonté de démocratisation : ils veulent mettre à la portée d’un plus large public les acquis de la connaissance. Dans JLF on voit mis en fiction de profonds débats sur la liberté, le matérialisme réservés en principe à l’essai ou au gros livre de philosophie.



le choix du genre est révélateur d’un homme des Lumières : Voltaire avait opté pour le contes (donnez quelques titres), DD a voulu un roman dialogué qui n’hésite pas à faire des allusions à CANDIDE (LISBONNE). DD ne passe pas ici par le genre “noble” à l’époque , le théâtre, il préfère le roman tout en gardant une structure dialoguée très forte, symbole profond des Lumières, soucieux de débats et d’ouverture face à des adversaires plus soucieux de censure et de dogmatisme.



Par exemple un sujet apparemment anecdotique revient régulièrement dans le roman : celui de la superstition et du pressentiment que Dd distingue pour laisser une place à l’intuition (chez le “génie” selon DD). Ce sujet est essentiel pour les Lumières : la superstition hante encore les esprits et pas seulement populaires (voir le maître et les emballements du cheval).


Dans ce dernier domaine comme en d’autres, un tel roman montre l’importance de la raison et du doute . Sans oublier non plus l’intérêt pour les différences et les êtres différents qui s’affirme dans le livre : on peut avoir peur de Pom mais elle a droit à quatre jugements : celui du M, de J, de l’hôtesse et celui très long du N . Tolérance, esprit d’examen, relativisme en découleront.



• enfin le roman lui permet de nous faire suivre les aléas d’un voyage et d’une vie, celle de J un héros très peu héros, un homme du commun, un homme issu du peuple et fréquentant des classes plus élevées. Songeons que dans le cours du roman le narrateur, citant J, souligne combien le peuple est dans une situation d’abjection scandaleuse. Avec J, il est facile, pour un lecteur peu familier des joutes philosophiques, de s’identifier au personnage principal et de suivre ses discussions si concrètes (les cousins pour débattre de la nécessité) - pour ensuite se faire une opinion qui ne sera pas forcément celle du valet.. J certes a des convictions, il est presque dogmatique sur certains articles de pensée mais il est inconséquent et c’est moins un système qu’il impose qu’une sagesse qu’il fait aimer et désirer.


Ce roman divertit mais permet de réfléchir : il vulgarise sans mépris, il rend accessible une pensée difficile, il n’idéalise pas son héros, il en montre les limites. Il est bien des Lumières.



2/UN ROMAN QUI EMBRASSE UN GRAND NOMBRE D’ASPECTS DE LA SOCIÉTÉ ET EN TÉMOIGNE DE FAçON CRITIQUE : amuser par la satire en dépassant le simple divertissement. Pour une prise de conscience.



beaucoup de classes sont traversées et, sur ce point, il a des ressemblances avec le picaresque *: nous avons des paysans (à vous), des artisans, des bourgeois, des nobles et les différences à l’intérieur des classes sont bien montrées : la noblesse de Pom est très éloignées de celle du M de J. Ce roman ne s’enferme pas dans une classe. Il n’exclut personne.



la dimension critique et satirique est patente : à vous (vous avez des cours) : faire vite sans tomber dans le catalogue.



*la lumière de la raison (et du comique de satire) ouvre les yeux sur=>


-les religieux : (il rejoint dans ce cas Voltaire) moines, Jean, Hudson. Les Lumières sont contre l’obscurantisme *et DD frappe assez fort dans ce domaine. Mise en scène et en cause des tartuffe : c’est le couvent, le monastère contre-nature qui choquent en ce qu’il fabriquent des haines, des perversions voire de la folie (frère Ange+ déclaration des Arcis).Dire que dans l’épisode Pom’ les Lumières sont clairement montrées comme des adversaires par le parti noble et par les cléricaux...


-les aristocrates : cf cours SUR LE SITE DU LYCÉE


-la question du pouvoir et de sa confiscation apparaît avec l’allégorie du château. Préciser.


-la royauté est attaquée de façon latérale par la mise en évidence de la misère du peuple, des soucis des paysans, par le célèbre passage sur l’injustice envers les orphelins du limonadier 322/3, par la dénonciation des lettres de cachet (Saint-Florentin dans l’affaire du pâtissier), par la connivence avec l’Église (Hudson) pour endormir les consciences (ce qui d’ailleurs avec cynisme Pom’) : insister sur la parodie de l’hôtesse qui reprend des éléments d’un conflit sérieux entre le Roi et le parlement de Paris : conflit dans lequel les Lumières avaient pris parti pour le parlement censé représenté les droits du peuple et d’un petit contre-pouvoir.



le souci de reconnaissance politique & sociale :


-parler du paradoxe de DD : niant la liberté, il est le plus grand avocat de la liberté dans tous les domaines



-la reconnaissance du mérite : dév le cas de J, ses capacités incontestables, ses qualités d’observation (les chiens, Richard), sa prise de pouvoir : la conclusion s’impose. J vaut mieux qu’un aristocrate paresseux ou parasite. Confions à des J des responsabilités dont ils sont plus dignes que d’autres. Conception qui accompagne la montée de la bourgeoisie qui prendra sous peu le Pouvoir avec la Révolution.



3/MAIS LES LUMIÈRES NE SONT PAS UN MOUVEMENT HOMOGÈNE : DD REPRÉSENTE UNE PARTIE TRÈS SINGULIÈRE DES LUMIÈRES.



DD est un penseur matérialiste qui n’expose pas complètement sa pensée dans le roman (ce n’est pas le lieu) mais laisse deviner bien de ses options - en dépit des erreurs et des méconnaissance de J : placer ici (vite fait) les grandes thèses du matérialisme qu’on recense dans l’œuvre (avec d’autres cours) : dire ce qu’implique le fatalisme de DD.[ Tout est dans le fatalisme de J etc]. Le matérialisme, même à peine effleuré ici, n’aurait jamais convenu à Voltaire par exemple.



[LE PASSAGE QUI SUIT EST TROP DIFFICILE: LAISSEZ TOMBER..

• des passages du roman prouvent que le débat passe entre des auteurs qui ont parfois travaillé ensemble pour l’Encyclopédie : le débat sur les cousins, sur l’opposition entre Providentialisme et déterminisme voit apparaître, en passant, un jeu sur deux prénoms proches : Jacques n’est pas Jean-Jacques 359. Ce qui est un façon de montrer que si le combat est commun, au cœur des Lumières, un Rousseau avec son génie campe sur des positions religieuses certes originales mais jugées dangereuses par un DD. Autre question , autre dialogue à distance : la question de la pitié (dire les occasions où le mouvement de compassion apparaît) : DD s’en prend implictement à Helvétius. Voilà un roman des Lumières conscient des diversités des Lumières. Les combats sont loin d’être uniformes.]



• enfin, comme mouvement émancipateur, les Lumières cherchent des précurseurs, des modèles et ils ont un souci de libération Y COMPRIS au plan esthétique. La préoccupation du présent oriente leur attente de l’avenir, dans tous les domaines.



-en général les Lumières doivent beaucoup à des philosophes du XVIIème (Hobbes, Leibniz, Locke) et sur bien des points on a vu la dette de DD : ainsi J a entendu parler en particulier de l’empirisme qu’il utilise bien (31).DD va beaucoup plus loin que bien des Lumières. Surtout s’appuyer sur Spinoza (même avec un avocat, J, peu initié) est un geste de pensée d’une grande valeur subversive à l’époque (Spinoza incarnant le diable...) : rares étaient ceux qui le suivaient sur ce terrain même si lui-même en avait une connaissance imparfaite.



-au plan littéraire le roman rend hommage à deux écrivains qui n’avaient pas tout à fait encore droit de cité : Montaigne apparaît à des moments essentiels du roman (l’obscénité, la verdeur de langue) et surtout Rabelais semble un maître dans la revendication carnavalesque : ce choix de filiation n’est pas innocent (cf mon cours sur la gourde).


-Dd assume donc un héritage choisi, orienté mais en même temps il met d’emblée en cause la forme littéraire qu’il a choisie ; c’est un roman certes mais c’est un roman qui critique beaucoup de genres romanesques et qui se met en scène, en cause en tant que roman et amène à penser autrement la vérité, la fiction, le vrai et le faux. On sait que sur ce terrain il doit énormément à Sterne.Dont les admirateurs français ont longtemps été peu nombreux.



cl : un roman des Lumières, oui, qui pousse à l’observation, à la prise de conscience critique, qui met en avant le dialogue comme moyen de penser sans intolérance mais un roman d’un certain courant des Lumières, l’un des plus radicaux, courant qui ne se contente pas de dénoncer ou de proposer mais qui interroge aussi la forme artistique choisie tout en se démarquant de bien d’autres.

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6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 05:53
                LA FIN DU MANUSCRIT DE JLF

SITUATION

        -GLOBALE (à vous)

        -partielle : J et son maître (arrivés au village où le M a mis en nourrice son fils qui est en fait celui de Saint-Ouin et Agathe (à vous - bien savoir la situation) découvrent que le vrai père et la mère les ont précédés : furieux (il vient d’être ridiculisé par J - à vous(histoire du cheval)), il dégaine et tue son rival avant de s’enfuir. J demeuré sans cheval (hasard - romanesque) est fait prisonnier. Soudain le N arrête ce récit.

LECTURE

ENJEU : mesurer l’ampleur de la parodie chez DD( parodie des romans qui veulent se donner pour vrais) au service d’une réflexion sur le roman./ OU PLUTÔT : MONTRER QUE LE JEU DU NARRATEUR & DU ROMANCIER PERMET UNE RÉFLEXION SUR LE ROMAN.

PLAN DE L’ANALYSE.

(On risque de vous interrompre à un moment ou à un autre : tout le monde croit que l'auteur, le narrateur dans le texte est DD; non, il est le romancier qui joue avec ce N-personnage qui lui ressemble en effet.)

1/UN NARRATEUR FIDÈLE À LUI-MÊME :
   
    a) bavard comme depuis le début du livre, il interrompt une fois de plus  son récit et  dialogue avec le lecteur inscrit* (citez son intervention :
et les amours de J? Rappelez vite les échanges tendus qu'ils ont depuis le commencement: appuyez vous sur le refus capricieux du N dans l'épisode du château/allégorie) ); plus bas  : il multiplie les impératifs et donne des conseils.

    Mais cette fois-ci ce pourrait être la dernière interruption.Ce n'est plus une lacune dans le manuscrit mais une absence complète de texte. Il manque la fin du manuscrit.


    b) comme depuis toujours il défend la véracité (citez vrai 385) de son texte : il nous l’a caché un temps mais il "recopie "ou  écrit depuis le début un manuscrit qui était en sa possession (385) et qui devrait revenir aux héritiers du M & du valet. La question devint très claire p 307 après la gourde, quand il avoua qu’il avait changé un mot et que  le document possède ici et là des lacunes que quelques savants gloseurs* tenteront de combler (bas de 307).

  c)le narrateur demeure l’homme scrupuleux qu’il prétend être depuis le début : il a tellement le souci de la vérité qu’il promet de travailler huit jours sur un livre déjà paru, des mémoires*:( désigne le récit fait par un homme ou une femme d'importance  qui donne sa vison de faits majeurs auxquels il a participé ; désigne aussi au XVIIIème une mode des  textes apocryphes* , des mémoires d'un personnage imaginaire : la mode du roman-mémoire fut grande et un éditeur-préfacier donnait toutes les (fausses) preuves de l'authenticité du récit qu'il publiait) C'est la raison pour laquelle notre N  se  méfie (suspects) de ces MÉMOIRES mais par souci de "scientificité" (relevez et citez contention, jugement, impartialité : il va devenir l'équivalent d'un savant philologue ou plutôt d'un responsable d'une édition critique d'un texte (avec des variantes etc....)= une plaisanterie évidemment) il va examiner pendant 8 jours les textes pour les comparer. Et en effet il se tarnsforme en éditeur .Traditionnellement l'éditeur vient au début du texte de Mémoires pour en garantir l'authenticité.

Il nous faut maintenant prendre en compte

 

2/UN ROMANCIER QUI CONTINUE À JOUER AVEC SON LECTEUR : le romancier étant celui qui agite les marionnettes que sont le N, J etc...


    a) depuis le début on nous fait attendre les amours de J :

-deux explications :

            1-J sait depuis longtemps que rien n'excite plus son M que des récits salaces de dépucelage ( citez 269 "j'ai toujours été friand du récit de ce grand événement......le seul qui soit piquant"): il est hors de question qu'il fasse ce plaisir à son Maître.

                   -comme le rappelle le N, J avait prédit qu’il ne pourrait les raconter (et même le redoutait par...superstition ...un spinoziste ne pouvant pas être  superstitieux...): en réalité J, fait ce qu'il veut et se joue de son M en se servant de sa théorie fataliste quand elle l'arrange.

             2-en réalité Dd joue avec le retard, le délai  pendant presque 400 pages et nous fait désirer le moment du grand désir de J. Nous en sommes restés à la cuisse de Denise mais elle est fort longue...p380 et bien des épisodes ont encore interrompu le récit de J. DD joue depuis le début sur notre attente et notre frustration. Il la renforce sciemment au moment crucial.Il nous interroge ainsi sur le désir sous-jacent à toute lecture : qu'est-ce qui fait le plaisir de la lecture?


    b)le romancier caché derrière le narrateur nous propose différentes solutions toutes plausibles mais profondément ironiques :

-le narrateur s’est  interdit toute fantaisie ( à vous) mais libre au lecteur de finir le livre à sa façon. Solution fondée sur l’imagination.La nôtre. Preuve de l'honnêteté du N.

-entretenant l’idée d’authenticité et de vérité, il nous suggère d’aller voir J en prison après avoir retrouvé Agathe (lire) : ce sera plaisant pour J qui doit se morfondre dans sa prison.Solution fondée sur une participation réelle du lecteur et attestant si c’était encore nécessaire que J existe bel et bien...Mais qui peut le croire?

-soudain un autre solution apparaît dont il faut reconstituer le parcours:toujours le jeu sur le retard (et si on allait trouver....?)

        -il y a  le manuscrit que le N vient de nous raconter, réciter ;

        -il y aurait aussi un autre texte déjà publié , des mémoires , sur les entretiens de JLF et de son maître (titre très prestigieux :avec un mot qui renvoie à un livre célèbre : entretien sur la pluralité des mondes ...de Fontenelle(1686));


                -ce texte est suspect mais il est immense puisqu’il est comparé au maître de DD, Rabelais ( rappelez l’hommage de la gourde), et au COMPÈRE MATHIEU  de Laurent ,roman licencieux (notes en bas de page) auquel DD a un peu emprunté. Un texte suspect mais immense dans la littérature !!Un texte donc littéraire et pas du tout une histoire simplement contée..Voilà notre manuscrit en concurrence avec un ROMAN !!!Le vrai et le romanesque !

                -mieux , après examen de la huitaine, il apparaît que le texte publié est le même que celui de notre N et on se demande alors pourquoi

 1-il le suspectait (un roman en plus, dit donc la vérité !!) , ce qui est un renversement complet des affirmations que nous assène le N depuis le début  &

2-pourquoi il publierait le sien.Que nous avons entre les mains ....


        - le romancier va relancer notre désir de lecture et le décevoir encore : un premier extrait jugé authentique sera encore interrompu ; le second est interpolé et c’est une réécriture d’un texte de Sterne, de son TRISTRAM SHANDY. Le troisième terriblement romanesque (Mandrin, libération du château) nous mène au-delà du mariage. Les amours de J, déjà vieilles de 20 ans ne seront jamais racontées.....

        c) le romancier nous aura "promené "depuis le début : nous avons cru à un récit fait par le N ; il n’est pas de première main mais recopié ; mieux on apprend que ce texte existe déjà, qu'il est publié et qu’il y a peu à rajouter.

  => Par amusement mais avec profondeur DD a joué sans cesse avec le vrai, le faux, le réaliste, l’invraisemblable, avec la mode des manuscrits retrouvés qui donnent lieu à des textes romanesques que son N refusait (même le dernier est suspect) mais mode à laquelle il a obéi aussi.

  Ce texte affirme le Triomphe ici de l’ironie et la volonté permanente d’ironie ludique. Ce roman est un jeu de miroirs où vrai et faux se renvoient l'un à l'autre....Profonde interrogation sur ce qui fait un roman, l'illusion à laquelle on adhère et les techniques qui l'entretiennent. Roman gai et sérieux.

L'illusion entretenue et montrée, démontée n'aura pas empêché DD de dire quelques vérités morales, politiques, philosophiques...


cl : DD aura apporté sa pierre à l'histoire du roman et il aura prouvé tout et son contraire: en homme des Lumières il nous a rendus méfiants, critiques. Le roman est déjà entré dans l'ère du soupçon (allusion au titre d'un livre du XXème siècle de Nathalie Sarraute  qui constatait une mutation dans le roman). Et enfin il nous a appris que le plaisir est aussi dans le retard.
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5 décembre 2008 5 05 /12 /décembre /2008 06:59



SITUATION GLOBALE : à vous

............... particulière :vous résumerez évidemment.

Au cours de la 8ème journée, le N se rappelle soudain qu’il a oublié de parler de la gourde qui occupe une place importante dans la vie de J (il faut la comparer et l’opposer à la montre, la tabatière de l’automate M) : cependant on avait compris à l’auberge que le champagne réduisait son amertume et qu’il avait une gourde avec tisane. Après les amours de J, voilà la gourde de J : le corps et le plaisir sont au coeur de cette journée....(Les amours du M seront nettement moins joyeuses...)

Le N va alors se lancer dans une digression sur cette gourde après avoir médité la place qu’en art on peut réserver à l’obscène : il s’est appuyé sur de nombreux auteurs et surtout sur Montaigne 304. Il en manque un, le plus audacieux, le plus scandaleux encore à l’époque des Lumières mais un maître pour DD (et pas du tout pour Voltaire par exemple) : Rabelais. On remarquera que c’est le N qui défend la dive bouteille même si c’est en citant souvent J...Un N qui est bien là, dans ce cas, le masque de DD.

LECTURE

ENJEU : voir en quoi cet éloge  est un des textes les plus drôles et les plus provocateurs du livre.

  En quoi cet éloge est-il à la fois drôle et sacrilège à force de matérialisme?AYEZ TOUJOURS EN TÊTE MA DISTINCTION EN ROUGE EN III: LA GOURDE SYMBILOSE L'IVRESSE ET LE GÉNIE CRÉATEUR DES HOMMES.



ANNONCE DE VOTRE PLAN DE LECTURE ANALYTIQUE

•••

I-UN NARRATEUR BIEN OUBLIEUX :

 a) Voilà huit jours que nous "cheminons en compagnie de J" et voilà qu’on nous apprend enfin que J consulte souvent une gourde remplie du meilleur vin : LISEZ QUELQUES LIGNES AVANT NOTRE EXTRAIT :quand on voit la régularité des consultations, le nombre donc et l’objet de la consultation (énumération drôle 305 : que de sujets sérieux à côté d’autres plus futiles !) on se demande vraiment comment le N a pu le faire : oubli réel ? Désinvolture ?

      En réalité il l’a fait exprès au moins par contestation de la rhétorique du roman dominant à l'époque qui nous dit très tôt l’essentiel d’un personnage : ici il a fallu attendre. Le portrait de J se fait de façon discontinue...Position importante dans l’esthétique du roman et que les grands réalistes du XIXème ne pratiqueront pas (pensez à Balzac et au naturaliste Zola.Seul Stendhal...).

b) l’oubli n’est pas unique (en dehors du chapeau de J p 362): on apprend par la même occasion que J ( qui a déclaré p24 qu'il ne voulait pas savoir ce qu'il y a d'écrit sur le grand rouleau ...))est un spécialiste de la divination et qu’il a même écrit un “petit traité (encyclopédique) de toutes les divinations”et qu’il écrit sur chaque sanctuaire de la gourde 306 UNE SORTE DE MONOGRAPHIE. Pensez au chapitre 25 du TIERS-LIVRE et sa liste délirante de méthodes de prédictions.. Et qu’il a une préférence pour la divination selon Bacbuc. [On apprendra plus loin qu’il a oublié son traité 375].Un traité de divination par un homme qui dit s'inspirer de Spinoza qui a dit pique pendre à propos de la divination? Nous ne sommes pas au bout de nos surprises.

=> pour l’heure retenons les acquis de cette réparation d’oublis : J écrit, réfléchit à la politique, à la guerre. Sa compétence suppose une fréquentation systématique et  de quelques mots de son capitaine qui est censé avoir lu  Spinoza et  de la gourde, son contenu étant masqué par le nom du contenant : du vin (synecdoque).J boit beaucoup : on pouvait s'en douter mais pas à ce point et avec cette fréquence. [ Plus tard un point apparaîtra : J a un usage méthodique de la gourde 376 au point que les ponts et chaussées en auraient fait un excellent odomètre...]


=>ce qui retient évidemment c’est la “liberté” de notre roman par rapport aux autres, son goût de la contestation esthétique désinvolte, son humour, son sens de la parodie. Parfois sacrilège comme on verra bientôt.

Ce qui frappe pourtant plus sûrement c’est



II-un éloge paradoxal[éloge de l'ivresse]:LE DITHYRAMBE* DE LA GOURDE : comment le N procède-t-il?

*Poème lyrique en l'honneur de Dionysos, sans doute improvisé à l'origine par les buveurs en délire, chanté par un chœur d'hommes déguisés en satyres, et caractérisé par une verve, un enthousiasme exubérants et désordonnés .

a) avec un parallèle  historique frappant, flatteur(et comique): J a les mêmes pouvoirs qu'une devineresse (pythonisse) sacrée.[Je le dis après mais ayez en tête l'idée que Dionysos, dieu du vin =Baccchus remplaçait quelques mois Apollon à  Delphes...] Il a déjà été comparé à Socrate, le voilà sybille émérite.


  La gourde est à J ce que la ”plante“ mâchée (laurier) et les vapeurs méphitiques venues de la terre sont à la Pythie *(à laquelle l’Encyclopédie de DD a consacré deux articles) : les oracles de J sont du même niveau et de la même qualité que ceux de la Pythie !

Point comique :on comprend à la description de la Pythie (cotillons (qui est anachronique) et cul nu) que ses sensations plus que curieuses. On imagine dans quel état peut être J...

Point  comique et satirique:ils ont tous deux  des mouvements du corps en sens contraires (soulignez le comique de l’opposition bas en haut et haut en bas qui revient en fait au même) : en réalité DD (masqué sous le narrateur) fait l’éloge de produits nés de la Terre et c’est avec ironie que DD fait remarquer que J est tourné vers le ciel quand il boit : pour DD ce ciel est vide et c’est la vie sur Terre qu’il faut célébrer) et pour des causes différentes ils sont “ivres” tous deux. Ivres de savoir...si on veut!


Voilà donc Jacques aussi inspiré que la délirante Pythie ( droguée pour le dire vite): on devine quel doit être parfois son degré d'éthylisme...Jacques comparé à une prêtresse païenne..Il faudra y revenir dans l'étude de la provocation.


Vient se greffer alors un personnage fameux de Rabelais : Bacbuc, (au nom si comique dans l'explication de Rabelais )la pontife de tous les mystères (qui tient une place éminente dans le CINQUIÈME LIVRE:dans des temples merveilleux d’architecture, elle permet à Panurge d’entendre le grand mot de la dive Bouteille , Trinch  : le mot “le plus joyeux, le plus divin, le plus évident” dit Bacbuc avant de suggérer de lire le livre énorme qu’il faut jeter dans une fontaine pour le gloser *( pour ceux qui ont la paresse de prendre un dictionnaire=éclaircir, commenter un texte par une glose) et qui rend alors inspirés  Panurge et ses compagnons au point de leur faire dire des vers spontanément. DD ne peut désavouer un texte qui dit que le vin peut ”emplir l’ âme de toute vérité, tout savoir et philosophie”.

J a donc, comme le dit une belle métaphore, sa Pythie portative, comme Panurge il voyage avec de "l’eau métaphysique"(CINQUIÈME LIVRE) et il la consulte partout et tout le temps. On voit qu’il n’a pas besoin d’interprète à la différence de la pythonisse grecque....Que d'avantages! DD n'est évidemment pas sans savoir que Dionysos remplaçait Apollon à Delphes pendant quelques mois....

[pour vous aider lisez la page 437/8 de POCKET]

On mesure tout le "sérieux" des prophéties de J...Dans ce sens la gourde prophétique est un alibi pour boire tout son saoul....


b) dans cet éloge comment  procède-t-il encore? Avec un rappel des grands devins du vin (argument d’”autorité”) : à côté de traîtres à la cause de la dive bouteille (Platon dans le dialogue  Cratyle, J-J R dans sa lettre à d’Alembert, comme par hasard des spiritualistes*), une “secte” d’auteurs a prouvé l’importance de la bouteille et du vin (parmi les plus connus : Rabelais (curé de Meudon) évidemment qu’il vénère (même s’il marque un léger désaccord (lequel? Mais évidemment Rabelais n'a jamais fait dire pareille chose à Bacbuc...), La Fontaine, Molière (pour LE MÉDECIN MALGRÉ LUI)) et plus récemment

-La Fare, marquis (XVIIème, poète galant à la vie fertile en aventures amoureuses...)

- Chapelle  (libertin proche de Gassendi, théoricien (qui passait à tort pour) matérialiste du XVIIème et ami de Molière ;Dassoucy en parle beaucoup dans son roman...Grand amateur de débits de vin...)

-Chaulieu (1639-1720),poète libertin et licencieux, surnommé l’Anacréon* du Temple)

[ hors de notre extrait, en bas de 304 =J a écrit son texte avec un frontispice consacré à deux défenseurs de la gourde, deux grands pontifes, Anacréon (poète du VIème siécle avant J.-C.) & Rabelais]


- Panard, contemporain des Lumières (satiriste et fondateur d’un cabaret, le Caveau fréquenté par Helvétius, Rameau, le peintre Boucher etc),


-Vadé, créateur de la littérature poissarde* HIST. DE LA LITT. [À propos d'oeuvres de la seconde moitié du XVIIIes. aux sujets réalistes traités dans un style imitant le parler populaire.] et enfin


- l’épicier chansonnier Gallet  (bien savoir le blasphème qui est  sur la page d'en face 307),

=> retenons : de grands buveurs, des épicuriens mais pas au sens d'Épicure, bref des libertins, ce qui n'est pas innocent...[vous voyez que DD fait lui-même le lien avec le libertinage du 17]


c) il procède enfin à  une sorte de  dithyrambe carnavalesque (un tourbillon ludique et enivrant de références, de jeux de mots, de railleries, d’inversion des valeurs, des priorités etc.grande spécialité de Rabelais), digne de maître Alcofribas Nasier (anagramme de Rabelais) : certes la langue du N n’a pas les audaces de l’auteur de GARGANTUA mais il se permet tout de même "cul nu"(mais nous sommes loin des torche-culs de Gargantua..), un renvoi à l’Évangile( la Pentecôte), une citation détournée d’Aristote ( j’aime Platon mais j’aime mieux la vérité que Platon) ; il se permet aussi une allusion avec le traité de J aux merveilleux chapitres XXV et XXVI du TIERS LIVRE de Rabelais ( si nécessaire sachez que Her Trippa nomme toutes les méthodes de divination avec des mots grecs à chaque fois (par les ongles grillés, le noir de fumée, les cendres les feuilles, les entrailles humaines...etc) qui ne disent qu'un chose Panurge sera cocu... : dans notre extrait  tout est mêlé, tout est sens ou sans dessus dessous : les grands littérateurs et les chansonniers ou petits auteurs libertins (vus avant) ; la religion est assimilée à des manifestations peu spirituelles, on mêle aussi le sacré chrétien et le sacré païen, les lieux de culte sont des cabarets (La Pomme de Pin 306 , taverne où se rencontrait La Fontaine, Molière etc) : la Foire (si présente chez Rabelais) semble un modèle de vie et de création littéraire [on a même à la fin du passage une invocation païenne 307, parodie de la prière].

    Sous l’éloge de Rabelais se distingue un manifeste* littéraire. Pour la joie et contre le plat, l’académique, le compassé....JLF est après la mort de Gallet le dernier espoir d'une littérature de GAI SAVOIR*.Mais le chant bachique est forcément



III-UN DITHYRAMBE* MATÉRIALISTE provocateur, sacrilège (qui sent le fagot dirait J). La gourde cache et révèle.

a) le carnavalesque que nous évoquions sert le sacrilège de la page (principe même du carnaval) :

    -énumérez le vocabulaire religieux (vénération, hérétique, sanctuaire) appliqué au vin ...


    -surtout  le N "ose" mettre sur le même plan, le SAINT-ESPRIT et la gourde, la Pentecôte (langues de feu) et les apparitions de la dive bouteille dans un cabaret 306 [ plus bas, hors-extrait]. ; il rabaisse le dogme, le discours chrétien au niveau du superstitieux païen (Pythie).

b) la réflexion sacrilège est matérialiste  :Ces pages sont d’une grande audace.

-le païen croit en l’oracle : des éléments matériels (laurier et odeur) sont les adjuvants matériels des oracles de la Pythie : personne n’est choqué parmi les croyants chrétiens, c’était un fait païen ; mais quand on affirme que le miracle des langues de feu est une erreur, que ce feu n’était pas miraculeux et que c’était une gourde qui le contenait, que  l'ESPRIT-SAINT était  dans le vin, que  les apôtres étaient  donc ivres morts voilà qu’on  touche à l’ESPRIT SAINT... À une représentation haute, sacrée de l’Esprit....Les apôtres parlaient soudain plusieurs langues ? Propos de bien ivres....

-en réalité il explique matériellement (par une cause interne, tel corps, plus une cause externe, le vin et non par un phénomène spirituel, d’origine divine) le mécanisme du devin : il serait prêt à reprendre le jeu de mots (paronomase) devin divin, divin de vin. En réalité avec un grand rire digne de Rabelais, et sur un exemple secondaire, la gourde, DD explique et ridiculise la mythologie spiritualiste*. L’inspiration ne vient pas d’ailleurs, surtout pas d’en Haut..Pas de Dieu, sinon de Dionysos, dieu du vin... vin monté de la Terre bien concrète. J boit à la régalade (note 1) mais son geste ne prouve pas que tout tombe du ciel.Tout ce que produit un cerveau est le produit d'un corps.Et si quelque chose vient de l'extérieur c'est quelque chose de matériel.


[La gourde est une (1)astuce de J (boire sans remords) et

(2) un symbole fondamental pour DD : l’intuition du génie (scientifique, littéraire, politique) est dans le lien inédit qu’il fait entre des éléments jamais rapprochés et qu’il va unir pour créer, inventer, découvrir, transformer.
Le scientifique anticipe, il a une idée produite par son travail, il se lance dans une hypothèse folle, AVEC UN ENTHOUSISAME FURIEUX,on le croit saisi d’ivresse : la gourde alors est, à une autre échelle que celle de J, le symbole de son génie qui déborde de la normalité trop commune
].



c) enfin cet éloge réserve une surprise, une de plus : J passe son temps à s'appuyer sur Spinoza et à consulter la gourde. Mieux , hors texte on apprend que le spinoziste capitaine était bacbucien  Donc souvent ivre....et  visiblement son disciple connaît mieux la dive bouteille que L’ÉTHIQUE. L’apôtre de la sagesse, de la rationalité, Spinoza est à son tour pris dans le carnaval du texte..

Il n’avait sûrement pas tout lu Spinoza et même pas compris grand-chose : sauf à penser que la joie spinoziste passe par la gourde et non par l’intellection intuitive de Dieu ! Ce qui bouleverserait les commentaires sur Spinoza... . On reconnaît la dette des matérialistes comme DD à l'égard de Spinoza mais aussi chez DD une grande peur devant l'esprit de système(L'ÉTHIQUE étant la plus belle construction qui soit en philosophie).

cl : Retenons l’essentiel : cet éloge de la gourde est un élément de sagesse matérialiste ET ÉVIDEMMENT HÉDONISTE. :en tout cas cette journée est lourde de sens : aucune préoccupation de la mort, un carpe diem rappelé au début d’une 8ème étape (p 262 bas/haut 263) où se côtoient sexe et gourde....Le seul culte, celui de la joie charnelle..peu spinoziste et plutôt dionysiaque... C’est aussi un manifeste "culturel" : faisons en sorte que notre XVIIIème siècle retrouve allant, enthousiasme. Enfin c’est aussi un manifeste littéraire en faveur d’une pensée écrite dans l’excès, la jubilation, avec un salut au maître, Rabelais que ne goûte pas le XVIIIÈ à cause de sa grossièreté.

NOTE

(1) Boire à la régalade. Boire, la tête en arrière, en tenant le goulot du récipient légèrement éloigné des lèvres de façon à ce que le jet de boisson tombe directement dans le gosier.

ANNEXE :Spinoza bacbucien ? Reportons-nous au scolie du corollaire II de la proposition XLV du livre IV de L’ÉTHIQUE. Que lit-on ?

En résumant : il est des choses dont il faut user et auxquelles il faut prendre plaisir sans aller jusqu’à la nausée ; il faut manger et boire modérément comme il faut user des odeurs, de l’agrément des plantes vertes, de la parure, de la musique, des jeux qui exercent le corps, des théâtres....Modérément. Bacbucien, Spinoza ? Pas vraiment.


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22 novembre 2008 6 22 /11 /novembre /2008 07:15
GOUSSE

-INTRODUCTION

        *GLOBALE : à vous

        *particulière. Dans leur voyage J & son M  sont dans leur 4 eme journée et le valet a bien des soucis avec le cheval que le M lui a acheté. Par ailleurs, à l’occasion de la rencontre d’un char d’enterrement assez vite suspect, J en est venu à raconter l’étrange histoire du capitaine et de son ami-ennemi (à vous si on vous interroge): ce duo est baptisé d’hétéroclites (
Qui s'écarte d'une norme stricte ou généralement admise)et on a peine à croire à leur comportement QUI SEMBLE PATHOLOGIQUE. Le N nous le garantit (bas 89) et pourtant le lecteur reste circonspect : LISEZ alors “VOILÀ ME DIREZ-VOUS DEUX HOMMES EXTRAORDINAIRES”. Cette exclamation va pousser le N avancer une thèse majeure.

LECTURE

ENJEU : quelles sont les fonctions de cette thèse et de ce portrait?GARDEZ POUR VOUS =>comprendre pourquoi, à l'occasion de ce portrait , les questions morale et esthétique ne sont pas séparables chez DD de sa philosophie.

MOUVEMENT d'un texte déductif, mouvement qui sera aussi notre plan d’analyse:

    1-la thèse du N

   2-une preuve par l’exemple qui donne lieu à un dialogue étonnant.


1)UNE THÈSE  sur l’art et la nature :

 Dans ce roman polyphonique, le N prend la parole plus sérieusement que d'habitude :

    a) le N réplique au lecteur inscrit et a l’intention d’être précis et long (après un premièrement nous aurons un deuxièmement, quatre pages après) : il avance une théorie qui appartient vraiment à DD, penseur matérialiste qui considère que la nature est une auto-production d’elle-même par reproduction différenciante sans finalité...(ce qui le rapproche de Spinoza qu'il n'a pas forcément lu de première main mais n'en parlez pas si on ne vous demande rien):la nature est variée . Entendons :elle  peut varier à l'infini.

          -la nature est variée dans les instincts et les caractères : ce vocabulaire n’est plus forcément  le nôtre (la notion de caractère ne passe plus pour scientifique) mais il importe de bien comprendre ce que dit DD: autant d’hommes ou de femmes, autant d’instincts et de caractères différents. DD sans avoir la moindre connaissance génétique, et pour cause, ce sera l’acquis du XXème siècle, pose que chaque être est singulier et, en matérialiste, il est persuadé que c’est le corps (auquel appartient le cerveau, l’esprit pour lui n’étant pas séparable du reste comme le prétendent les croyants et les spiritualistes) qui nous détermine fondamentalement d’où l’emploi d’instinct et caractère.

    -la nature est si variée : chaque être a une organisation propre et la nature produit forcément des êtres différents jusqu’à l’étrange au point que la réalité, comme on dit, dépasse la fiction: un poète (au sens large, Corneille, Racine sont pour DD des poètes tragiques) pourra avoir une fantaisie débridée , il pourra proposer des bizarreries (=qui s'écarte de l'ordre habituel des choses) et bien, rien de ce qui nous semblerait excessif car imaginaire n’est absent de la nature. Il suffit d’ouvrir les yeux, d’observer autour de soi pour comprendre cette vérité : la nature peut tout produire et il faut savoir l’imiter, autrement dit restituer AUSSI ce qui échappe à la norme (physique, morale, intellectuelle). La norme ne doit pas cacher, éliminer ce qu’elle ne reconnaît pas, ce qui lui échappe. Le bizarre existe, il est réel.
   
    b) ayant avancé sa thèse, le N va préparer alors l’apparition de Gousse l’original sans principes(93)

      Comment? En partant d’une œuvre littéraire, une pièce de Molière : jusque-là, jusqu'à Gousse, il nous dit qu'il tenait LE MÉDECIN MALGRÉ LUI pour une fiction amusante, distrayante  mais folle: entendons une exagération, une pure invention.Il a  longtemps ri du personnage de Molière sans penser un instant qu’il ait pu exister. Or il a rencontré son double, son pendant réel : ce sera Gousse.

    • le lecteur  inscrit décidément très cultivé (autant que le N mais surtout que ...DD) comprend l’allusion à la première scène de l’acte I entre Sganarelle et Martine sa femme et il la cite de mémoire. Scène qui finit en coups de bâton mais que le N sélectionne plutôt pour la verdeur et la brusquerie de l’échange verbal (vous avez le texte de Molière).

  Il faut alors en tirer une première conséquence, double:

1-l'art imite traditionnellement  la nature (proposition canonique de cet Aristote que citent sans cesse les Sganarelle de Molière ( à quoi fais-je allusion?)), et
tout est imitable dans la nature y compris l’exceptionnel, le monstrueux. Il ne saurait y avoir de tabous. DD ne connaît pas la notion de réalisme (vous aurez une fiche sur cette difficile question) mais il l’enrichit d’avance: rien  ne saurait échapper à l’art qui n’a pas qu’affaire au beau (grand débat qui sera imposé par les réalistes du XIXème siècle) mais aussi au laid, au hideux, au repoussant (pension Vauquer, mort d'Emma, saleté chez Zola) .Il faut savoir observer, tout observer. Et tout rapporter, transcrire.

2-en même temps, même quand il donne l'impression d'inventer, l’art permet de voir la nature dans toute sa diversité. Qui dit si le N aurait "remarqué” Gousse s’il n’avait pas lu Molière avant de le rencontrer ?


    L’art n’a pas de normes d'origine morale...surtout pas celle de la vraisemblance ou de la bienséance...(pensez à la question du langage dans JLF (bigre, foutre: on l'aura vu). Il faut bien reconnaître toutefois que DD aura une position très moralisatrice et larmoyante dans son théâtre.

  La thèse étant proposée, il faut passer à sa vérification personnelle.




2) UN PORTRAIT EN QUELQUES MOTS  rapporté par le N qui tient le dialogue de sa femme. Encore une voix rapportée dans ce roman où chacun cède la parole à quelqu'un d'autre ( à vous pour quelques exemples faciles).


a) ce qui frappe dans cette  succession de répliques:

    -leur brièveté : on peut faire difficilement plus court. G a l’art de désamorcer toute tentative de conversation. Il ne relance pas, il clôt. Il ne prend pas la parole, il répond sèchement sans volonté de suite.

    -cette brièveté exprime une forme d’incivilité : on l’accueille et il ne prend pas la peine d’être courtois : ce qui était politesse de la part de la femme du N sonne soudain le vide .

    -en même temps, on sait déjà beaucoup sur lui en très peu de mots : on comprend qu’il a une famille, n’a pas beaucoup d’argent (sans se plaindre) et que, géomètre, il lui faut réparer des moulins (plus loin nous voyons qu’il vole le N et vole pour le N 93). DD aime le portrait en action ou peint à travers les dialogues.

      *dans l’économie du roman, dans sa construction ce personnage est une antithèse de J :où le valet est bavard, cherche à raconter sans cesse, à argumenter à tout propos, G fait dans le laconique. Raconter ses amours demandera des centaines de pages pour J; pour Gousse une scénette, des répliques suffisent. De plus il y a comme un fatalisme chez lui, bien plus marqué que celui de J qui pleure à la découverte de la mort de son capitaine.Mais un fatalisme jamais théorisé, jamais déclaré.


b) on ne peut qu’être choqué par certaines de ses répliques. On a le sentiment d’approcher un être insensible, jouant sur les mots (je ne suis pas un autre), profondément indifférent aux autres (avec des degrés dans l’odieux : il ne s’intéresse pas au meunier, à sa femme et ne semble faire aucun cas de la mort de son fils et de l’éducation des autres). Il y a  presque chez lui du cynisme * au sens grec mais sans volonté d’aboyer, d’attaquer les autres. comme le faisait Diogène et comme le veut l'étymologie du mot (chien).Sans intention pédagogique. Il fait réfléchir sans avoir à donner de leçons, sans même y penser.

 Ici nous avons affaire à un être
incontestablement socialisé (il tient une école) mais qui ne fait pas grand cas de la socialité, de l’hospitalité, de l’attention à autrui. Sans le vouloir, sans le savoir,  il permet à ses interlocuteurs de penser autrement leur rapport aux autres. Sans en avoir la moindre intention, il attire l'attention sur lui. 

Par exemple sur l’éducation (citez le passage 91) il va à contre-courant des Lumières qui est en profondeur un mouvement  pour l’émancipation de l’humanité loin de l’ignorance, de la superstition : il est à l’opposé d’un Rousseau qui écrit L’ÉMILE, un grand traité de pédagogie, et loin de la volonté didactique de l’Encyclopédie..de D'alembert et DD. Lui se contente d'affirmer: nous sommes ce que permet notre organisme. Si nous avons de l’esprit, nous aurons  la chance de faire ce qu’il nous plaît et comme lui, de devenir un bon mathématicien-géomètre. Sinon il est inutile  de nous faire multiplier les études : on voit combien Gousse n’est pas moderne et ne croit pas au milieu. Plus loin Gousse retrouvera pourtant quelque chose qui fascine DD depuis longtemps : la justice distributive 93( savoir expliquer ce point avec WIKIPEDIA =

À l'inverse de la justice commutative qui établit une égalité arithmétique, la justice distributive établit une égalité géométrique. Elle prône la distribution selon le mérite, faisant cas des inégalités entre les personnes. Aux personnes inégales, des parts inégales.

Les droits, obligations, charges et avantages, sont répartis dans le respect de critères qui varient selon l'idéologie de l'époque antique. À chacun son rang, ses mérites, ses besoins et ses actions.

2. C'est suivant ce principe de justice distributive qu'étaient formés les gouvernements grecs dans l'Antiquité.

3. Aujourd'hui, la justice distributive est synonyme de justice sociale. Ainsi, elle a pour but de réduire les inégalités injustes et d'augmenter les inégalités « justes », selon la vision d'Aristote de la justice).



    Mieux encore:  dès la page suivante on verra notre G se sacrifier pour un couple d’amis (Prémontval). La grand attribut de G, c’est la contradiction qui n'est pas vécue comme telle par lui. Mais qui a un effet sur la pensée de DD. J ne dira-t-il pas que nous changeons d'avis plusieurs fois par jour?

c) en effet un Gousse ne vient pas par hasard, au fil de la plume et du dialogue comme nous cherche à le faire croire le dispositif de la narration discontinue, interrompue sans cesse. Il est placé dans deux journées où il est beaucoup question de jugement : un juge s’est trompé en accusant J; le lecteur est incapable de savoir si le capitaine de J est mort. J se trompe sur la profession du bourreau. Et G vient s’ajouter à la liste  sur un point important. Le N est catégorique :ET PRONONCEZ APRÈS CELA SUR L’ALLURE DES HOMMES...93

  On voit la fonction du personnage et des anecdotes qui le concernent: il s’agit de mettre le lecteur, nous, dans l’impossibilité de juger cet original. Ce qui a deux vertus pour DD:

1) au quotidien évitons de juger à tort et à travers (mais il faudra bien une justice...et DD proposera des solutions radicales...cf Lettre à Landois )

2) admirons ou seulement respectons  ces êtres fantasques, étranges, marginaux parfois qui nous font réfléchir et qu’on ne peut négliger : il y a en chacun une anomalie visible qu’il faut savoir admettre. DD a beau condamner Hudson, il a beau comprendre la détestation que provoque Mme de la Pom’, il ne se prive pas d’en faire un éloge vibrant et magnifiquement argumenté (précisez ? Apologie de Pom' 217/8/). Soyons tolérants et curieux de tout.Le style oral de Gousse est comme le style d'un écrivain, un point de vue sur le monde.

cl: à l'occasion d'un portrait qui n'est jamais physique, Dd nous donne en passant une petite  "leçon" de morale  (pas du tout moralisatrice) et d’esthétique: sur ce point DD enjambe largement l'ambition "du portrait réaliste et naturaliste " du XIXème siècle. Le portrait d'un Balzac ou d'un Zola définit le personnage, l'interprète, le rend prévisible. Dans le cas de Gousse, on ne nous donne pas d'explication générale du personnage. Mais nous apprenons aussi de lui, d'une autre façon. On ne s'étonnera pas que l'un des plus grands livres de DD soit LE NEVEU DE RAMEAU.
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16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 16:04
            LE CHÂTEAU ET SON ALLÉGORIE



INTRODUCTION

Nous sommes à la fin de la troisième journée du voyage de J & son maître: le valet a commencé le récit de ses amours et il en est au moment où il demeure chez des paysans. Un débat s’est engagé entre eux sur les femmes : le N résume cet échange quand il est interrompu par le lecteur inscrit.

LECTURE

ENJEU : voir les libertés que prend le romancier et comprendre ce qui se joue dans cette apparente gratuité.

MOUVEMENT DU TEXTE :

    -un caprice du N

    -une évocation d’un château

    -une pirouette du N.


ANNONCE DU PLAN DE VOTRE LECTURE.


1/UN NARRATEUR QUI CONTINUE À ÊTRE ENVAHISSANT :


a) partons d’ "INCOMMODE" et "maudits questionneurs" 37:comme toujours depuis le début (rappelez p 14)  il se plaint  du narrataire (ou lecteur dit inscrit) qu’il appelle lecteur et qui a une place dans ce roman au point de constituer un duo de plus dans un texte qui n’en manque pas. On note que l’échange sera indiqué avec des tirets qui insistent un peu plus sur la dimension théâtrale du livre (à préciser avec par exemple la bonne auberge, le comique de l’aubergiste et du paysan ou la querelle de J et son maître (descendre etc)).

    Ce lecteur inscrit semble aimer la précision et ici sa question porte sur une exigence bien louable et réitérée ( cf incipit la 3è et 4è question): la localisation () de la troisième nuit de ce voyage dont nous ne connaissons ni le point de départ ni celui d’arrivée. Exigence louable dans la mesure où notre narrateur ne cesse de garantir la vérité de tout ce qu’il rapporte.


b) le narrateur est toujours omniprésent et, dans ce cas, contrariant : il ne lui plaît pas de nommer le lieu de repos des cavaliers. C’est à ses yeux sans intérêt et c’est une façon de répondre avec humeur au lecteur qui quelques pages auparavant dans l’opération du genou de J avait refusé quelques détails trop "réalistes"..28/9.

  DD, le romancier, en passant indique une convention inaperçue (une stratégie et une rhétorique) du roman qui veut faire vrai : il suffirait d’un nom et le lecteur serait content. Il y croirait..

Le narrateur va jouer sur deux possibilités : le proche de Paris (Pontoise/Saint-Germain) et le lointain (deux localités célèbres pour leur pélerinage), histoire de montrer son mauvais caractère et l’inutilité du renseignement...

DD sait, lui, où il veut nous mener : il nous annonce discrètement que tout ne sera pas connu dans ce texte prétendument véridique : ainsi nous ne saurons jamais 1-où résidait le fils de Saint-Ouen que le Maître a mis en nourrice , ni 2-où allait notre couple à l’occasion de ce voyage. En outre les précisions de décor, de villages, de ville seront quasiment absents...

En revanche nous saurons finalement dans les pages qui viennent (retour de la mémoire 43) où ils passèrent deux jours : à Conches 44. Mais le problème pour les amateurs de vérité c’est qu’il y a deux Conches en France dans des directions opposées (Normandie et Champagne).

Sur ce point enfin  observons un paradoxe qui ne saurait surprendre chez DD et dans ce roman : à vouloir ne pas répondre au lecteur le N devra subir l’assaut de nombreuses questions dans son invention improvisée (citez quelques questions de 37).


c) infidèle à son parti-pris de vérité, à son credo d’authenticité, notre narrateur se fait imaginatif et improvisateur :

-habile comme toujours, le N, manipulé par le romancier, entretient une autre fiction : il écrit au fil de la plume et dans une oralité (l'image du magnétophone anachronique s’impose) comme enregistrée en direct il lui vient une belle invention (vers...oui ; pourquoi pas ?...) qui doit intriguer ce lecteur "incommode".

-en outre le N fait exactement l’inverse de ce dont il se défend à chaque occasion et qu'il le fera magnifiquement dans la suite immédiate de notre extrait. Son refrain étant : "il ne tiendrait qu’à moi p 12 etc. de multiplier les hasards..." Esquissez la lecture de quelques soit, soit 38. Il se permet ce qu'il se refuse sans cesse.


    Cette fantaisie a un effet immédiat : elle nous  pousse à croire encore plus qu’il dit vrai pour le reste : tout est incontestable. Quand il ne se fait pas capricieux et quand le lecteur ne l'interrompt pas....


Lisons donc cette digression en forme d’allégorie*[suite d'éléments descriptifs ou / et narratifs dont chacun correspond aux divers détails de l'idée générale qu'il a pour fonction d'exprimer: lire une allégorie, déclarée ou non, c'est lire à deux niveaux]


2/LE CHÂTEAU ÉNIGMATIQUE :



a)une situation classique : on sait que ce roman aime la parodie, la citation (donnez un ou deux exemples : citation de Tristram Shandy à la première page, parodie de Rabelais pour la gourde etc)).Et comme notre narrateur a décidé de jouer, il va jouer une carte extrêmement connue dans le roman ou ailleurs  et depuis longtemps:

-un lieu d’importance, un château immense mais qui ne sera jamais décrit (on sait le peu de prix que reconnaît à la description J et son écrivain.. cf chapeau tardif)

-un frontispice à l’entrée qui fait énigme comme l’entrée des Enfers dans LA DIVINE COMÉDIE de Dante dont il est question en passant p 263 (VOUS QUI ENTREZ ABANDONNEZ TOUT ESPOIR ) ; on pense surtout au  maître de DD, Rabelais  et à l’inscription inimitable qui figure au fronton de l’abbaye de Thélème (fin de Gargantua) : je ne cite que la première strophe dans la langue du XVIème.

    Cy n'entrez pas Hypocrites/ bigotz/
    Vieulx matagotz/ marmiteux boursouflez.
    Tordcoulx badaux plus que n'estoient les Gotz.
    Ny Ostrogotz/ precurseurs des magotz/
    Haires/ cagotz/ caffars empantouflez.
    Gueux mitouflez/ frapars escorniflez
    Befflez/ enflez/ fagoteurs de tabus
    Tirez ailleurs pour vendre vo' abus.
    Vous abus meschans
    Rempliroient mes champs
    De meschanceté
    Et par faulseté
    Troubleroit mes chants
    Vous abus meschans.




-un énoncé: lequel ? Double et doublement contradictoire pour ce château se désignant :un paradoxe de plus.

-1- avancée à la première personne, une devise fondée sur une antithèse et un parallélisme ( personne /tout le monde) et portant sur la propriété.

-2-adressé à un VOUS généralisateur mais actualisable par chaque visiteur, le second énoncé s’appuie sur la flèche du temps : hier/avant vous y étiez déjà avant que d’y être et vous y serez encore après votre sortie.


b) le dialogue cherche à résoudre cette double affirmation mais naturellement le N se montre récalcitrant, et semble peu dérangé par la contradiction :


-il répond de façon alternative en télescopant les énoncés : ils ne purent entrer car il appartenait à quelqu’un ; ou alors comme dit le frontispice ils y étaient déjà ; ils ne purent en sortir puisqu’ils n’étaient pas entrés ou parce que la sentence disait vrai (ils y étaient encore) ; le narrateur joue avec les possibles pour repousser ce lecteur importun. Le N fait clairement obstruction.

- comme il répond avec agacement à certaines questions (il parle sèchement comme Gousse*mais de façon volontairement imprécise ou paradoxale), le lecteur inscrit change son interrogatoire - sans grand effet au début : le Narrateur fâché d'être encore plus interrompu répondant du bout des lèvres.


    -quelle fut l’action du duo ? Comme d’habitude : J parle du grand parchemin et le M obéit à son valet (belle ironie de "ce qu’ils voulurent") ;


    -quelles rencontres ? Des personnes de milieux différents.


    -qualités des échanges : comme partout. Le N revient à son procès du lecteur inscrit.

Le N reste évasif et se force à répondre.

        =>Soudain à un moment donné le N se fait plus sympathique et plus narratif: il avance presque à visage découvert.


c) il nous guide dans la résolution de l’énigme :il parle de VRAI SENS DE L’INSCRIPTION qu’il avait suspectée auparavant ...Le N se fait donc narratif :


            le château a été investi par des vauriens*, qui s’appuyant sur une fable, celle d’un droit de propriété légué leur donnant la permission de s’approprier des appartements jamais assez grands ; droit faux, droit usurpé qui s’appuie sur la force, celle de coglions : la signification devient évidente avec une dimension politique qui renvoie à l’article AUTORITÉ POLITIQUE de DD dans L’ENCYCLOPÉDIE  qui n’a rien de révolutionnaire mais fixe bien la réflexion*(cf infra l'annexe où il pose que si le pouvoir est délégué ce ne peut être que par CONTRAT, concept venu de Hobbes et retravaillé par J.-J.).

        -la terre est à tout le monde et à personne en particulier : revendication qui a aussi un passé théologique mais l’Église a bien oublié ce point...Politiquement, entendons : l’État est à tous et aucune autorité usurpée ne doit régner : proposition audacieuse chez un DD qui ne pensera jamais au-delà de la Royauté-bien éclairée par des philosophes. L'invention libère la pensée du N : qui met-il en cause avec cette compagnie de vauriens? Pas ici de chef mais quoi .....des ministres? À quelle tyrannie fait-il allusion? On dirait qu'il va jusqu'à contester la monarchie héréditaire , ce qu'il n'a jamais fait par ailleurs.

         -le romancier aura glissé, en passant, une autre lecture de l'énoncé (comme en contrebande): il faut entendre une exégèse plus matérialiste : si nous sommes nature, corpuscules, atomes, nous étions dans l’univers avant et nous le serons encore après...

Mais voilà qui repose la question du statut du texte, de son genre , de ses enjeux. N'avons-nous affaire qu'à une simple digression due au caprice?


3/UNE ENTRÉE EN MATIÈRE BIEN PROBLÉMATIQUE :nous avons  à peine lu quelques pages du roman. Et le mot frontispice nous intrigue

        a) on sait qu’un frontispice s’applique aussi  à un  livre :


-en architecture donc = Façade principale d'un grand édifice. Le frontispice d'un temple (Ac.).
-par anal., en TYPOGRAPHIE=
1. Titre principal d'un livre illustré de gravures, ornements, vignettes. Le grand titre ou frontispice est par excellence la page annonciatrice de l'ouvrage.
2. Par extension : Illustration qui figure en regard d'un titre de livre.

Le lecteur se demande où on le mène :nous sommes dans un texte qui soudain prend une forme allégorique. Provisoire à cause du caprice du N. Et en plus ce N dénonce juste après  l’allégorie comme procédé facile, digne d’esprit médiocre..

Il se demande alors  si ce passage n’est pas le frontispice un peu décalé du roman? Un frontispice qui ne dirait pas son nom? Que le N signale puis récuse..

    b) faut-il comprendre que nous entrons dans un roman allégorique qui ne dit pas son nom  et pas du tout un témoignage de faits arrivés au duo J & son maître?

[autre définition :une allégorie, c'est une description ou un récit qui présente en soi un sens immédiat suffisant, mais dont les éléments recèlent des valeurs symboliques qui fondent son sens second, son sens intentionnel, tout étranger au premier.]

Faut-il le lire allégoriquement JLF et ne pas se contenter d'écouter leurs bavardages? C’est bel et bien la thèse d’un grand lecteur de DD, Francis Pruner : quelle allégorie ? Politique.

   * résumons sa thèse : dans son organisation le roman suggère une certaine conception de la société. Dans les premières journées (brigands à l’auberge, misère des paysans), il faut comprendre que la société maltraite son peuple ; dans les dernières journées le roman montre assez l’état déliquescent de l’aristocratie (Hudson et le pouvoir religieux, le maître de J, les maîtres de J tous médiocres, lâches etc) ; au centre dans les journées V, VI et moitié de VII on voit une auberge où il fait bon vivre, manger, boire où J prend le pouvoir officiellement sur un rappel à une affaire historique récente face à un maître : autrement dit ce texte amusant mettrait en valeur les hommes de vrais mérites en contestant ceux qui abusent de leur pouvoir. Et le roman s’achève sur une menace : un J peut très bien devenir un compagnon de Mandrin....Leçon : ainsi vaut-il mieux lui confier la conciergerie du château...mais par là même il fait des disciples ...



    c) le lecteur, une fois de plus, est perplexe: le narrateur  nous dit que c’est une allégorie mais parle  seulement du  château et  pas du  livre et il reconnaît que l'allégorie n'est pas un signe d'esprit créateur ...Il semble se raviser et abandonne son jeu.

  Le lecteur est au rouet : que faut-il penser? Que le roman qui nous attend est complexe et qu'il ne nous facilite pas la tâche tout en réclamant plus que d'autres notre attention. Disons qu'e DD continue à problématiser la réception de son texte.

         -ainsi nous aurons beaucoup de mal à savoir si le capitaine de J et mort ou pas.

         -mieux: nous pouvons deviner une organisation thématique des journées. Or nous entrons dans la quatrième journée qui sera dominée par une question lancinante : peut-on juger correctement? Y a -t-il un  jugement absolument sûr?

                          -le lieutenant général, l’ami du M et de J commet une erreur de jugement avec la servante 45/6 qui prétend que J lui a donné la bourse pour coucher avec elle alors que ce n’est pas vrai..

                         -les mésaventures de J et du cheval vont entraîner des supputations infinies.

                          -Gousse va poser des problèmes considérables : comment le juger moralement? 93

                        - J a toute une théorie sur les quiproquos et affirme que nous changeons d'avis au gré de nos humeurs et des circonstances 81...




On relit alors  cette allégorie du château et on se dit qu'elle renvoie à la Vérité, au moins dans son premier énoncé: elle est à tous et  personne n'a le droit de se l'approprier et de s'en faire les défenseurs. Ni théologiens, ni savants, ni philosophes.

 Prétendre s’approprier la vérité ou la vérité d’un texte est une autre preuve de pouvoir abusif...Ce que ce texte contradictoire prouve aussi.

     


cl : le N poursuivant son caprice nous laisse ensuite 8 possibilités narratives (très satiriques) pour finir par avouer innocemment que le duo coucha en fait à Conches...Nous ne sommes pas au bout de nos surprises dans ce roman qui s'interroge sans cesse sur ce qu'est un roman et son interprétation....

•••••••••••••••••••

ANNEXE *Diderot : Article : Autorité politique (L'Encyclopédie)

Aucun homme n’a reçu de la nature le droit de commander aux autres. La liberté est un présent du Ciel, et chaque individu de la même espèce a le droit d’en jouir aussitôt qu’il jouit de la raison. Si la nature a établi quelque autorité, c’est la puissance paternelle : mais la puissance paternelle a ses bornes ; et dans l’état de nature, elle finirait aussitôt que les enfants seraient en état de se conduire. Toute autre autorité vient d’une autre origine que la nature. Qu’on examine bien et on la fera toujours remonter a l’une de ces deux sources : ou la force et la violence de celui qui s’en est emparé ; ou le consentement de ceux qui s’y sont soumis par un contrat fait ou supposé entre eux et celui à qui ils on déféré l’autorité.
La puissance qui s’acquiert par la violence n’est qu’une usurpation et ne dure qu’autant que la force de celui qui commande l’emporte sur celle de ceux qui obéissent : en sorte que , si ces derniers deviennent a leur tour les plus forts, et qu’ils secouent le joug, ils le font avec autant de droit et de justice que l’autre qui le leur avait imposé. La même loi qui a fait l’autorité la défait alors : c’est la loi du plus fort.
Quelquefois l’autorité qui s’établit par la violence change de nature ; c’est lorsqu’elle continue et se maintient du consentement exprès de ceux qu’on a soumis : mais elle rentre par là dans la seconde espèce dont je vais parler et celui qui se l’était arrogée devenant alors prince cesse d’être tyran.
La puissance, qui vient du consentement des peuples suppose nécessairement des conditions qui en rendent l’usage légitime, utile à la société, avantageux à la république, et qui la fixent et la restreignent entre des limites ; car l’homme ne doit ni ne peut se donner entièrement sans réserve a un autre homme, parce qu’il a un maître supérieur au-dessus de tout, à qui seul il appartient tout entier. C’est Dieu, jaloux absolu, qui ne perd jamais de ses droits et ne les communique point. Il permet pour le bien commun et pour le maintien de la société que les hommes établissent entre eux un ordre de subordination, qu’ils obéissent à l’un d’eux ; mais il veut que ce soit par raison et avec mesure, et non pas aveuglément et sans réserve afin que la créature s’arroge pas les droit du créateur. Toute autre soumission est le véritable crime de l’idolâtrie. Fléchir le genou devant un homme ou devant une image n’est qu’une cérémonie extérieur, dont le vrai Dieu qui demande le cœur et l’esprit ne se souvient guère qu’il abandonne à l’institution des hommes pour en faire, comme il leur conviendra des marques d’un culte civil et politique, ou d’un culte de religion. Ainsi ce ne sont point ces cérémonies en elles-mêmes, mais l’esprit de leur établissement, qui en rend la pratique innocente ou criminelle. Un Anglais n’a point de scrupule à servir le roi le genou en terre ; le cérémonial ne signifie ce qu’on a voulu qu’il signifiât ; mais livrer son cœur, son esprit et sa conduite sans aucune réserve à la volonté et au caprice d’une pure créature, en faire l’unique et le dernier motif de ses actions c’est assurément un crime de lèse-majesté divine au premier chef.


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